Au printemps 2024 avait lieu une occupation de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), en solidarité avec le peuple palestinien. Suite à cette occupation, un étudiant se trouve aujourd’hui au cœur d’une affaire disciplinaire. Accusé de « coups et blessures avec motivation antisémite » pour s’être opposé à une provocation de militants pro-israéliens, il a vu la commission disciplinaire rejeter le caractère antisémite des faits une première fois. La commission disciplinaire devra donc statuer une seconde fois sur les faits ce lundi 3 novembre 2025.
La commission disciplinaire convoquée par les autorités de l’ULB a examiné le dossier au printemps et durant l’été 2025. Si l’altercation a été reconnue, le caractère antisémite des faits n’a pas été retenu par la commission. Une décision qui aurait pu clore le dossier, mais la rectrice de l’ULB a choisi de faire appel à la décision prise par sa propre institution relançant ainsi la procédure devant le bureau du Conseil académique (CoA). Cette instance, composée des doyen·nes de chaque faculté, est l’une des plus importantes de l’ULB.
Cette décision de faire appel prolonge considérablement la procédure et maintient l’étudiant dans une situation d’incertitude, l’affaire pouvant déboucher sur un renvoi définitif de l’Université. La procédure était pourtant déjà très lourde et longue, le tout pendant les examens de l’étudiant. Ses soutiens y voient un acharnement et dénoncent une instrumentalisation de l’accusation d’antisémitisme.
Cette affaire s’inscrit dans un contexte plus large de pressions politiques croissantes sur l’ULB concernant la question palestinienne. D’après les témoignages des étudiant·es qui ont récemment rencontré la rectrice, cette dernière aurait affirmé s’être rendue chez Georges-Louis Bouchez, président du MR connu pour ses positions antiwoke virulentes, et Nora Bussigny, figure médiatique du même courant idéologique, affirme également avoir rencontré la rectrice.
La rencontre avec Georges Louis Bouchez aurait eu lieu dans le courant du mois de septembre, au siège du parti du Mouvement Réformateur. Cette rencontre portait essentiellement sur la question de l’antisémitisme sur le campus, et elle avait plus des airs de passage de savon pour la rectrice et ses collaborateurs que d’une simple rencontre.
Ces rencontres présentées comme en lien avec le mouvement pro-palestinien à l’ULB soulèvent des questions éthiques majeures sur l’indépendance de l’université face aux pressions politiques. Qu’une rectrice d’université soit inviter a se rendre et à rencontrer des personnalités politiques ouvertement hostiles aux mouvements progressistes, dans un contexte où elle mène des procédures contre des étudiant·es pro-palestinien·nes, ne peut qu’alimenter les interrogations. Ces contacts sont des illustrations supplémentaires des pressions qui pèsent sur la direction de l’ULB. Par-delà la pression politique sur la direction de l’université, se pose par ailleurs la question d’une porosité dangereuse entre pouvoir politique et autorité académique, où les décisions disciplinaires risquent d’être influencées par un rapport de force institutionnel ou des considérations partisanes plutôt que par les faits et le droit.
Comment la communauté universitaire peut-elle avoir confiance en une procédure disciplinaire quand sa plus haute autorité reçoit des conseils de figures réactionnaires ? Et comment expliquer que l’appel fait de la décision à l’encontre de l’étudiant poursuivi ai eu lieu dans ce cadre ?
En septembre dernier, l’ULB a déjà cédé aux pressions de l’extrême droite dans l’affaire Rima Hassan. Des étudiant·es en droit avaient souhaité baptiser leur promotion du nom de cette avocate franco-palestinienne, militante des droits humains et eurodéputée. Une proposition qui a déclenché une campagne de pressions orchestrée par l’extrême droite et des groupes pro-israéliens, exigeant que l’université interdise ce choix. Résultat : face à cette campagne d’intimidation, la direction de l’ULB a décidé de cacher le nom de la promotion le jour de la proclamation, en décidant de ne pas l’afficher sur les écrans comme il est habituellement d’usage dans les cérémonies de remise de diplôme.
L’acharnement contre les étudiant·es, la complaisance envers les pressions antiwokes, le refus du nom de Rima Hassan : tout ceci pousse à croire qu’à l’ULB, la solidarité avec la Palestine n’est pas la bienvenue, et est devenue un motif de répression. L’accusation d’antisémitisme, brandie systématiquement, sert d’arme pour criminaliser toute forme d’engagement en faveur des droits du peuple palestinien. La direction de l’université, sous pression des milieux politiques et de l’extrême droite, a fait le choix de la censure.
Un rassemblement aura lieu ce lundi 3 novembre pour soutenir l’étudiant poursuivi par l’ULB, et pour s’indigner de la répression du mouvement pro-palestinien à l’université.
Le rendez-vous est à 15h45 devant la Maison des Sciences Humaines (1 avenue Antoine Depage, campus du Solbosch), au moment où se tiendra la commission de recours qui vise l’étudiant réprimé.
Ce rassemblement est organisé par plusieurs collectifs étudiants et de travailleur·euses de l’ULB qui appellent à soutenir l’étudiant réprimé : Union Syndicale Etudiante, Université Populaire de Bruxelles, Cercle du Libre Examen ULB, ULB Palestine, Comité BDS ULB, CGSP, University Workers for Palestine.
Sources :
Témoignages
Communiqué de University Workers For Palestine : https://universityworkersforpalestine.wordpress.com/2025/10/29/la-rectrice-sacharne-contra-la-solidarite/
La Libre, 25 octobre 2025. « En France, j’avais déjà vécu beaucoup de situations problématiques. Mais j’ai été effarée par ce que j’ai vu à l’ULB » https://www.lalibre.be/international/europe/2025/10/25/nora-bussigny-en-france-javais-deja-vecu-beaucoup-de-situations-problematiques-mais-jai-ete-effaree-par-ce-que-jai-vu-a-lulb-DG7EXQGJGRBXPHYMVBH6KOFVGE/



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