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Abus au sein du collectif 269 Libération Animale - Pour une lutte antispéciste qui n’exploite pas ses activistes

Abus au sein du collectif 269 Libération Animale - Pour une lutte antispéciste qui n’exploite pas ses activistes

Nous, militant.e.s antispécistes, Nous voulons témoigner des comportements abusifs au sein du collectif 269 LA qui ont des conséquences fortes sur la santé mentale des activistes, sur leur capacité à être autonomes, et qui mènent à toujours plus de fichages à travers l’Europe de toujours plus d’activistes antispécistes à qui on vole le libre arbitre. Nous voulons que la banalisation de la maltraitance des activistes cesse, et que le milieu militant antispéciste apprenne à prendre soin, il en est aussi de la survie du mouvement.

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Aujourd’hui, nous décidons d’ouvrir la parole sur l’autoritarisme subi par les activistes du collectif 269 Libération Animale. Ce collectif français a été dirigé par un couple de 2016 à 2023, puis par une des deux leader.euse.s : définissant leur collectif comme « antispéciste, anarchiste et anticolonialiste » pratiquant des occupations d’abattoirs et des évasions de personnes non-humaines.

La décision de parler publiquement a été longue et découle de la prise de conscience que les impacts néfastes de cette organisation perdurent, et que nous en subissons toujours les répercussions psychologiques.

Autoritarisme et manipulation

Les personnes voulant rejoindre ce collectif sont en grande majorité des militant.e.s de la « protection animale », iels viennent d’associations de sensibilisation au spécisme. Iels sont habitué.e.s aux actions légales et se sentent souvent impuissant.e.s dans ces modes d’actions face à l’immensité du spécisme et l’horreur que vivent les personnes non humaines. Souvent, ces militant.e.s ne connaissent ni la culture anti-répression ni anti-autoritaire. Beaucoup ne connaissent ni la violence policière ni quoi que ce soit autour des actions de désobéissance : nous n’avons donc pas de possibilité de comparer avec ce qui se fait dans les autres collectifs d’action directe. Ce sont des militant.e.s qui cherchent donc à être plus efficaces, à s’impliquer davantage dans la lutte antispéciste et à rejoindre un collectif radical.

C’est principalement sur les réseaux sociaux que la séduction opère pour attirer ces militant.e.s avec une esthétique qui a toujours été judicieusement travaillée. Textes et discours lyriques, vidéos avec musique palpitante, illustrations avec dress code 100% en noir, sweat à capuche, cagoule, une apparence donc très « radicale, black bloc, action directe » qui n’est pas sans rappeler l’imaginaire « ALF » beaucoup fantasmé par le milieu. Alors que les blocages ne nécessitent pas d’être habillé.e en noir ni cagoulé.e étant donné que le principe est de rentrer dans un abattoir et de s’y attacher en attendant de se faire déloger par la police un.e par un.e. Tout ça a pour but de faire de la pub qui recrute : fascination, admiration, idéalisation sont les effets recherchés. La manipulation commence déjà avant même d’avoir rejoint le collectif avec cette séduction sous forme de promesse de révolte. (De plus, il y a peu de choix : en effet, peu de collectifs antispécistes pratiquant des actions directes s’affichent sur les réseaux sociaux.)

Donc quand on réussit à rejoindre le collectif pour la prochaine action, on se sent impressionné.e et reconnaissant.e. Il n’y a pas d’AG ni de réunion ni de rencontre ni d’organisation préalable. On arrive direct sur le canal de discussion où la future action est exposée : elle est déjà décidée et organisée. L’ambiance sécuritaire (car ce n’est qu’une ambiance vu les gros défauts de sécurité) impressionne et donne une sensation de risques, de grande importance et de solennité. On sent tout de suite qu’on doit se faire tout.e petit.e, à l’écoute et obéissant.e car on a le privilège qu’on nous fasse confiance pour intégrer ce groupe aussi « fermé » , « sélect » .

Des consignes sont données puis nous devons dire « ok » pour certifier que nous allons les suivre précisément. Il n’y a aucune place pour répondre autre chose que « ok », nous n’avons pas la parole. Il est sous-entendu que cette organisation autoritaire est essentielle pour le bon déroulement de l’action et le fonctionnement du collectif de manière plus générale. Donc on se convainc que notre obéissance est indispensable pour la sécurité. Il n’y a pas que en amont d’une action que la parole ne nous est pas donnée puisqu’il n’y a jamais eu d’assemblée générale ni même de réunion ou de discussion collective en 7 ans. Donc pas de possibilité de choisir son propre rôle. Il arrive que des militant.e.s du collectif tentent de remettre en question des choses, d’apporter des critiques ou de vouloir que certaines choses changent (organisation, stratégie…) mais celleux-ci sont ignoré.e.s ou décrédibilis.é.s, et si ça ne suffit pas de nouvelles conversations sont créées sans elleux pour que le groupe ne sache pas ce qu’iels avaient à dire. Des messages les discréditant peuvent être publiés pour être sûr que personne n’ait envie d’être de leur côté. On comprend vite qu’il va falloir être dociles sinon on peut se faire exclure des prochaines actions.
On a peur de perturber cette organisation « si bien huilée » avec nos propositions, et puis ce n’est jamais le bon moment. Quelconque initiative est empêchée.
Seules les idées qui vont dans le sens de celles des chef.fe.s, qui ne font que renforcer leur autorité, sont valides. Finalement elles ne viennent pas vraiment de nous. Les discours de la cheffe à l’esthétique insurrectionnelle et fédératrice avec de belles tournures, métaphores et un fort appel aux émotions jouent un grand rôle et agissent comme un leurre qui nous éblouit et nous fait adhérer malgré l’autoritarisme. Ça créé toute une ambiance et un état d’esprit : on croit faire partie d’un collectif révolutionnaire, il y a un grand travail qui est fait avec les mots pour créer l’illusion.

A certain.e.s d’entre nous est octroyée une place un peu plus haute dans la hiérarchie : on a un peu plus d’infos, un semblant de responsabilités nous sont données, l’impression d’avoir un peu de pouvoir, et donc de marche de manœuvre. Cette place proche des chef.fe.s se fait toujours par la manipulation émotionnelle. En réalité en tant que membres du « noyau », nous répondons juste à ce qu’attendent de nous les chef.fe.s qui nous donnent la sensation d’être utiles et plus que de simples « soldats ». Mais surtout d’être des ami.e.s, « des camarades complices » avec la mise en place d’une fausse intimité. Le lien créé est déséquilibré, la cheffe sélectionne les aspects qu’elle partage et donne en même temps l’illusion d’affection et de proximité (surnoms, compliments, montrer une certaine vulnérabilité...). Cette relation est entièrement contrôlée. Ainsi à cette place on devient dédié.e.s et exclusif.ve.s. On acquiesce aux demandes, quitte à prendre des risques judiciaires non conscientisés parce que c’est un honneur qu’on ait tout particulièrement besoin de nous. On est individualisé.e pour une fois !
On accède aussi au privilège d’être invité.e.s au sanctuaire pour rencontrer les personnes non-humaines (mettre des visages sur les personnes sauvées est très important en tant qu’activiste antispéciste, ça permet de nous donner de la force positive pour s’engager encore plus). Avec cette manipulation affective, nous sommes aussi plus enclins à donner plus de temps et de force de travail au sanctuaire. Lors de ce temps passé ensemble on nous fait se sentir spéciales.aux.

La hiérarchie et le culte de la personnalité nous mettent dans une position d’admirateur.ice, donne la sensation de reconnaissance pour celleux qui sont sélectionné.e.s pour être « plus proches ». Toute cette image est mise en scène déjà sur les réseaux sociaux ou dans les médias avec des photos des leader.euse.s en personnages principaux du collectif : mégaphone face à la foule attentive (le contenu des réseaux sociaux est publié par la cheffe). Ce qui créé tout un fantasme autour de ces personnalités qui deviennent des célébrités dans le milieu.

Et ce n’est pas juste la recherche d’influence que l’on dénonce mais comment elle est utilisée pour maintenir un respect inconditionnel de la part des membres du collectif et une emprise sur celleux du « noyau ».
Pendant l’action, c’est toujours les mêmes personnes qui donnent aussi des ordres « tu t’assoies là » , « vous vous attachez maintenant », « on a besoin d’hommes pour telle chose » . Le « noyau » a aussi pour utilité de maintenir le reste des militant.e.s obéissant.e.s (la hiérarchie quoi).

Les prises de parole médiatiques sont toujours faites par les chef.fe.s et sans concerter le collectif. On a donc aucun mot à dire sur ce qui sera dit, montré dans les médias ni sur le choix du média en question ni même sur la présence de ce média lors d’une action. C’est une occasion pour maintenir ce culte de la personnalité : ce sont elleux qui sont interviewé.e.s, le collectif c’est elleux.
Lors d‘interview, ces deux chef.fe.s se sont par ailleurs approprié.e.s diverses actions directes dont 269 LA n’étaient pas l’auteur.

Les militant.e.s de 269 Libération Animale n’ont donc pas la parole au sein de leur propre organisation, ni dans les médias. Les chef.fe.s leur interdisent aussi de témoigner sur les réseaux sociaux.
Tout est mis en oeuvre de manière pernicieuse pour que l’on ose pas poser de questions, proposer des idées, prendre des initiatives. On ne veut pas non plus laisser penser qu’on saurait des choses que les chef.fe.s ne savent pas, on ne veut pas perturber cette hiérarchie. Qui suis-je pour donner un avis contradictoire ? Alors que ces gens ont l’expérience et le savoir que je n’ai pas.
Personne n’a envie de se faire rembarrer par les chef.fe.s devant tout le monde. Le levier de la culpabilité est aussi mobilisé : les animaux meurent pendant qu’on dévie de leurs consignes.
On pense avoir beaucoup à perdre en cas d’exclusion car les militant.e.s deviennent notre entourage et parfois les seules personnes qui peuvent nous comprendre car iels ont vu ce qu’on a vu.

Une fois le pouvoir d’initiative confisqué, le manque d’autonomie des activistes dépendant.e.s, même pour des petites décisions ou questions, est utilisé pour justifier la nécessité de l’autorité.

En plus d’être dangereux pour la santé mentale des militant.e.s, l’autoritarisme est dangereux pour la lutte. On peut croire que nous n’avons pas la capacité d’agir sans chef.fe.s, que nous sommes bon.ne.s qu’à suivre des consignes puisque celleux qui décident et planifient nous semblent inaccessibles, et ne transmettent aucune infos ou savoirs permettant d’acquérir de l’expérience et des compétences pour être autonomes.

La dépendance est aussi maintenue avec l’idée sans cesse rabâchée que « les autres n’ont rien compris, il n’y a que nous qui sommes radicales.aux et utiles ». Cette idée créé une méfiance pouvant aller jusqu’à une haine envers les autres militant.e.s antispécistes et renforce un sentiment d’être seul.e.s contre le monde.

Il n’est pas rare que les chef.f.e.s dénigrent, insultent, moquent les autres militant.e.s antispécistes qui seraient selon elleux stupides, ridicules, contre-productif.ve.s et égoïstes alors que nous, nous sommes vraiment dévoué.e.s.

Les autres moyens d’actions, collectifs et personnalités antispécistes sont également jugé.e.s : égocentriques, inutiles ou copieur.euse.s. Ainsi on reste fidèle à ce collectif, cela joue aussi sur la sensation factice et toxique de cohésion, de complicité : nous sommes les seul.e.s vrai.e.s antispécistes radicales.aux et de gauche.
Les collectifs avec une organisation moins hiérarchique et qui prennent en compte le soin collectif sont décrits par les chef.fe.s comme mous, qui abandonnent les animaux au profit de leur sécurité.

Toujours dans cette intention de fidéliser les militant.e.s : nous faire croire que le grand soir se prépare, que bientôt nous passerons à l’étape supérieure afin de nous tenir en haleine, maintenir un niveau de stress et d’attention ainsi qu’une sensation d’être exactement où il faut. Ainsi les chef.fe.s conservent notre exclusivité dans le collectif, dans l’attente du prochain ordre donné.

On peut d’ailleurs remarquer cela dans la com’ pour des événements annoncés sur les réseaux. Ces « actions » ont pour seul but de rameuter des militant.e.s avec des titres accrocheurs « les abattoirs vont trembler » pour de simples rassemblements pacifistes devant des abattoirs. Il faut que ça ait l’air radical, l’air révolutionnaire, l’air Grand ! Donc des teasings ambiance insurrectionnelle, il faut faire croire au Grand soir, non pas pour faire peur aux grands groupes spécistes, mais pour séduire des personnes qui veulent être utiles.

Un collectif anarchiste ? On se demande comment ça peut être crédible tant l’organisation est hiérarchique et autoritaire. Ce qui est incroyable c’est que tout ça n’est quasi jamais questionné par les activistes qui sont d’une grande docilité. Et cela montre bien que la manipulation est bien installée, l’emprise même pour certain.e.s. Pour en sortir complètement, pour comprendre que cette organisation est toxique et violente, on a besoin de prises de conscience en dehors du groupe et de découvrir que dans les autres collectifs féministes, autonomes… Rien de tout ça ne serait accepté.

Parole confisquée

TW abattoirs, sang, meurtre, agression sexuelle

Nous n’avons pas le droit de partager ce qu’on a vu ni vécu lors de ces actions. Ni l’horreur des abattoirs, ni les violences policières. Ça serait perçu comme un moyen de se victimiser et de détourner l’attention des victimes du spécisme. Les seuls partages doivent être ceux des chef.fe.s sur les réseaux sociaux du collectif. Les textes, les discours viennent toujours de la même personne. Si on fait vraiment ça pour les animaux, alors on doit se faire invisibles.

Même les retours d’expérience entre les activistes sur les conversations sont proscrites, pas de débrief. On nous dit que ce n’est pas nous les victimes et que c’est indécent de parler de ce qu’on vient de vivre, du fait que ça nous atteint. Mais comment un collectif peut fonctionner sans retours ? Sans communication en son sein ? Comment des militant.e.s peuvent perdurer dans le temps sans pouvoir se livrer sur les expériences souvent traumatiques ? Passer une nuit à entendre des personnes non-humaines pleurer et hurler de détresse et de terreur, à voir des veaux tenter de faire demi-tour et se faire pousser dans l’abattoir, les entendre pleurer, les voir se faire tuer à la chaîne. Voir leurs corps dépecés, voir quelqu’un.e de vivant pendant des heures puis la voir se faire tirer dans la tête et entendre la scie la découper. Passer des heures à coté de leur peau encore fraîche, sentir leur sang et leurs excréments s’imbiber dans nos pantalons. Croiser des centaines de poules empilées dans des caisses et les laisser puis rentrer chez soi. Avoir l’odeur de l’angoisse, de la merde, de la mort qui reste dans le nez même une fois rentré.e chez soi seul.e sans pouvoir le raconter à personne, devoir aller à l’école ou au travail avec tout ça.

Comment peut-on laisser des militant.e.s traumatisé.e.s rentrer chez elleux en leur disant de la boucler sur tout ça ? Comment créer un collectif qui va dans des lieux aussi violents sans penser le soin de ces militant.e.s ? Et refuser que ce soin soit à peine évoqué.

Cet environnement favorise le maintien des violences et met gravement en danger ces militant.e.s. Comment témoigner d’un comportement oppressif ? Comment dire quand il s’est passé des choses non appropriées lors d’une action ?

C’est le parfait terreau pour que des agressions sexistes, sexuelles, racistes, lgbtqi+phobes aient lieu sans que personne ne soit au courant et sans que la victime puisse être soutenue. Les faits d’agressions sont étouffés par les chef.fe.s lorsque les victimes leur en parle. Personne n’est au courant. Et ce sont les victimes qui partent du collectif avant les agresseurs.

N’importe qui peut rejoindre ce collectif, il n’y a pas de charte. Rien n’indiquant que les comportements oppressifs, discriminatoires ne sont pas les bienvenus. En tant que minorités, on peut vite se retrouver dans des situations nous mettant en danger. En plus de devoir gérer les risques d’une action militante, nous avons le poids de devoir passer des heures assis.es jambes écartées collé.e.s à des personnes pas safe qui n’ont pas à se justifier.

Et par dessus tout ça, la cheffe n’hésite pas à s’approprier les luttes anti-coloniales et féministes pour se donner une image de gauche radicale intersectionnelle et une crédibilité, et donc une visibilité dans les milieux antifascistes. C’est une violence de plus, rendant insoutenables les visites (prises de parole, soirées de soutien) de cette cheffe dans les espaces libertaires agissant comme une piqûre de rappel que nous n’avons toujours pas la parole, que le pouvoir et l’influence est toujours au même endroit. Et pendant ce temps nous on se traîne encore les traumas de cette période d’assujettissement.

Face à la répression

Aucune défense commune, concertée et politique n’est mise en place.

On est endormi.e.s par les raisons citées plus haut et aussi car la cheffe use de sa posture d’autorité : juriste. Après chaque blocage d’abattoir, la police procède à la vérification d’identité de chaque activiste. On se retrouve devant la police sans connaître nos droits, ni les procédures.
Aucune préparation à la vérification d’identité ni à la garde à vue !
Perdu.e.s, certain.e.s parlent aux flics.
On se retrouve seul.e également devant le juge au tribunal à devoir répondre de nos actes pour une action collective !
Pas de partage de ressources anti-répression ou de bonne pratique, pas de réunion ni d’atelier ou de discussion autour de l’autodéfense juridique ou policière. La seule chose qu’on nous dit c’est que le refus de donner son identité, ses empreintes et son ADN peut entraîner des poursuites et nous faire rester plus longtemps au commissariat. Avec si peu d’infos et non sans influence : dans la queue au commissariat, chacun.e suit le mouvement et donne l’un.e après l’autre identité, empreintes, ADN. Parce que le covoiturage t’attend, que les camarades sont fatigué.e.s et doivent reprendre la route puis le taf le lendemain. Rien n’est fait pour qu’un refus soit envisageable et soutenu par le collectif, bien au contraire. Ce fichage systématique des militant.e.s de 269 Libération Animale se répand depuis 2017 à travers la France, la Belgique, la Suisse, l’Italie, l’Espagne, l’Allemagne et les Pays-Bas (puisque le « collectif » se déplace à travers l’Europe). Qui plus est, avec un très grand turn-over dans le collectif ! Le travail des flics se voit grandement facilité et la pertinence de ces actions de désobéissance civile qui finissent d’office au comico ne doit jamais être questionnée. Sinon on risque l’exclusion implicite comme le ghosting ou la décrédibilisation auprès des autres. Ne pas s’opposer à ce fichage de masse n’est pas étonnant quand on est dans une optique de maltraitance et de non considération des militant.e.s.

Sans stratégie sur le long terme et sans défense commune organisée, on peut craindre l’impact d’un tel fichage sur le mouvement antispéciste.

Sans avocat.e dans le collectif, chacun.e gère ses problèmes judiciaires dans son coin isolé.e, reçoit ses convocations au tribunal à la maison. Celleux qui peuvent choisissent un.e avocat.e, mais souvent dépourvu.e.s on se retrouve avec des avocat.e.s qui nous mettent plus dans la sauce plus qu’iels nous aident. Les défenses sont inégales entre les militant.e.s, et c’est accentué entre celleux qui peuvent se payer une bonne défense et les précaires qui se voient parfois avoir de plus fortes condamnations.
Beaucoup de militant.e.s qui rejoignent le collectif sont des personnes sans aucun bagage à l’anti-répression. Iels ne connaissent ni leurs droits, ni les risques encourus. On nous met en tête de ne pas trop poser de questions tout court et aussi sur cette question de la répression avec le credo : qu’est-ce que des amendes ou un risque de prison à côté de ce que subissent les personnes non humaines ?
’’S’épandre" sur des questions de répression serait prendre la place de victimes, serait preuve de faiblesse alors que nos situations sont si privilégiées (par rapport aux animaux toujours). Alors on se met vite dans un état d’esprit que « foncer tête baissée sans se protéger » c’est égal à « être vraiment un.e allié.e déterminé.e pour les animaux ».
Et que de toute façon les chef.fe.s ont plein de condamnations en suspens donc nous on peut bien en avoir quelques unes. Car pendant les premières années en tant que « dirigeant.e.s » iels se sont « sacrifié.e.s » en prenant la responsabilité juridique pour elleux deux seul.e.s à chaque occupation.

La manipulation est aussi présente ici, on peut recevoir un appel ou un message privé de la cheffe qui nous demande en urgence un « service » . À ce moment-là, on nous valorise et nous individualise (je demande qu’à toi, tu as l’expérience et tu es de confiance). Ce service ça peut être de déclarer à notre nom une manifestation factice qui engendra d’être considéré.e organisateurice des actions de désobéissance par les enquêtes de police. On ne sait pas que c’est un stratagème et reconnaissant qu’on nous confie une tâche perso, l’emprise opère et on accepte directement sans penser aux risques éventuels (qui n’ont jamais été évoqués d’ailleurs). Nous sommes plusieurs à s’être retrouvé.e.s avec des condamnations en tant qu’organisateurice comprenant le piège longtemps après. Sans manipulation, on se serait rendu compte de ce qu’on faisait, de ce que ça impliquait, on aurait réfléchit et pas donné la réponse dans la seconde. On aurait la sensation d’avoir le choix, on aurait eu l’espace de poser des questions.

Avec ces stratégies, les chef.fe.s jouent le jeu de la répression : nous isolant dans nos procès et nos condamnations.

Nous sommes donc à l’opposé d’un collectif anarchiste et anticolonial, puisqu’ici pas de collectif, pas de solidarité. Mais tout ça est fait de manière très insidieuse en nous persuadant par le discours que nous formerions un collectif dont la force résiderait dans nos complicités.

Et les thunes ?

Il n’y a donc pas d’organisation collective face à la répression et aucun.e activiste n’a accès à la thune du collectif.
Pourtant il y en a eu des dizaines de milliers d’euros sur des cagnottes, des soirées de soutien qu’on nous encourage à organiser chacun.e dans notre coin… Mais les comptes sont gardés secret par les chef.fe.s.
Aucune aide financière ne sera donnée, la précarité de certain.e.s activistes est ignorée, pourtant la cheffe dénonce souvent sur les réseaux la précarité dans laquelle iels seraient, omettant au passage de préciser ses privilèges (classe sociale, aide familiale, niveau d’études…).
Plusieurs d’entre nous se sont retrouvé.e.s dans des situations compliquées : amendes accumulées débitées sur notre compte en banque, ou directement auprès de l’employeur.euse, huissier.e au domicile puis à celui des p.m.arents… Et bien sûr tout cela dans l’isolement puisque ce n’était pas géré collectivement. La place n’est jamais faite pour parler de tout ça. Il est perçu comme indécent de demander de l’aide au collectif : c’est se faire victime à la place des animaux. Le sujet de la thune est rendu tabou, libre aux chef.fe.s de la monopoliser.
La rétention d’infos systématique est un moyen de retenir le pouvoir.

Le refus de se remettre en question : mise en danger des personnes non humaines du sanctuaire

L’idée omniprésente que les autres sont nul.le.s se poursuit dans la gestion du sanctuaire. Les sanctuaires sont des lieux de vies pour les personnes sauvées des abattoirs et des élevages. Ces personnes ont une santé très fragile due aux sélections génétiques et aux mauvaises conditions dans les élevages. Iels ont besoin de soins méticuleux durant toute leur vie en sanctuaire. Pour savoir quelle nourriture et quelles pratiques de soin sont les plus adaptées, il est indispensable de s’appuyer sur les recherches que des militant.e.s antispécistes et des vétérinaires réalisent. Par exemple, le refuge de l’ABVA donne ses précieux protocoles sur le groupe Facebook « chicken nurse », l’ « Open Sanctuary Project » met des guides à disposition sur son site ou encore des sanctuaires comme Groin Groin propose des conseils sur l’alimentation des cochons. Il est essentiel de pouvoir échanger les expériences autour de la santé entre sanctuaires car trop peu de ressources fiables sont disponibles et les vétérinaires ruraux.ales sont incompétent.e.s.

Or chez 269 LA, les questionnements autour des pratiques de soin étaient vivement rejetés sous prétexte qu’« on s’est toujours débrouillé.e.s seul.e.s ». Rien de surprenant, c’est le même mot d’ordre que pour le reste. Mais ici des conséquences dramatiques directes sur la vie des personnes non-humaines dépendantes. Des personnes cochons et truies nourries quotidiennement au mélange biscottes, pâtes, farine d’engraissement (de magasin d’élevage). Induisant des difficultés locomotrices et de grandes souffrances. Des poules qui ne voient jamais de vétérinaire NAC (le suivi véto est indispensable chez les poules notamment dû à leurs problèmes génitaux systématiques).

Il est possible d’avoir des difficultés à gérer un sanctuaire car c’est loin d’être facile, il est possible de se tromper car nombreuses sont les fausses infos en ligne, et que bon nombre de vétérinaires ne sont pas formé.e.s. En revanche, le refus de se questionner, et d’être à l’écoute de personnes et de lieux compétent.e.s est une mise en danger délibérée de la vie et du confort des personnes accueillies.
Nous disposons que trop peu de ressources sérieuses et vérifiées de soin antispécistes pour les personnes sorties d’élevage pour refuser de les prendre en compte au profit d’un jeu d’égo.

Le soin est politique ! Et cela prend tout son sens dans la lutte antispéciste qui se fait avec et pour des personnes non-humaines blessées et usées physiquement et mentalement par le système.

Ce qui se passe dans les luttes c’est politique !

L’autoritarisme et la maltraitance d’individus au sein des collectifs et associations usent les luttes et les activistes.
Publier ce texte c’est la prise de conscience que le silence nourrissait ce poison qui affaiblit la lutte antispéciste en France (et ailleurs).
C’est prendre conscience que parler n’allait pas nuire aux personnes non humaines, mais au contraire prendre soin de cette lutte.
C’est ne pas la laisser se faire malmener et affaiblir.
C’est ouvrir la voix à une lutte antispéciste qui prend soin de ses activistes. Un.e activiste épuisé.e, fiché.e, isolé.e n’aide personne.
Il y a la peur de nuire à ce petit milieu qui a déjà du mal à se crédibiliser. On ne veut pas participer à le fragiliser, à le dénigrer.
Pourtant c’est cette toxicité qui use des activistes qui se voient abandonner le milieu pour survivre. Une lutte qui brise et une stratégie qui fiche ses activistes n’est pas viable. Une lutte sans soin est vouée à l’échec.
Ce n’est pas simple d’ouvrir cette parole.
Au début on se dit que s’éloigner et ne plus remuer ces expériences est la meilleure chose à faire. On ne veut pas prendre le risque de se faire attaquer ou silencier une dernière fois par les personnes qu’on dénonce ou par celles qui en sont éprises. Comment peut-on remettre en question le statut autoritaire, dénoncer sa violence et sa manipulation quand cette personne est si adorée et bénéficie d’influence ?

Ce qui se passe dans les collectifs n’est pas privé et nous devons en parler.

Pour des luttes fortes et durables

Ouvrons la parole,

Autonomisons nous,

Prenons soin,

De nombreuses ressources pour prendre soin de nous en lutte sur

payetonburnoutmilitant.fr

Vous pouvez envoyer vos témoignages (anonymes ou non) à lutteantispelibertaire@protonmail.com

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