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Inhabitabilité & expulsions : interpellation communale à Etterbeek

Inhabitabilité & expulsions : interpellation communale à Etterbeek

Le 22 mai, des habitant.e.s de la commune d’Etterbeek et militant.e.s du Front anti-expulsion ont interpellé le bourgmestre et les autres membres du conseil communal à propos d’une expulsion pour inhabitabilité décidée par la Commune. Nous reproduisons ici le texte de cette interpellation.

Bruxelles | sur https://stuut.info

Interpellation communale au sujet des expulsions locatives suite aux arrêtés d’inhabitabilité et le relogement des ménages concernés.

Monsieur le bourgmestre,

Mesdames les Échevines, Messieurs les Échevins,

Mesdames et Messieurs les membres du conseil communal d’Etterbeek,

Je vous remercie de me recevoir aujourd’hui.

En tant qu’habitant de la commune d’Etterbeek, j’ai été récemment témoin de l’expulsion d’une famille avec 4 enfants par les services communaux, suite à un arrêté d’inhabitabilité. Le logement occupé était effectivement déclaré insalubre depuis mi-mars par la DIRL, suite à une plainte de la famille souhaitant contraindre le propriétaire à faire les travaux nécessaires.

Suite à l’affichage de l’arrêté sur la porte de l’immeuble concerné un mois après l’interdiction de location, la famille n’a pu être au courant de la date précise de son expulsion et ce, malgré de nombreuses relances auprès des services communaux, du CPAS et du cabinet du bourgmestre. La semaine suivante, le jour même de l’expulsion, elle a dû empaqueter en hâte toutes ses affaires avant d’être relogée in extremis dans un logement dont elle ne connait, à ce jour, ni la durée d’occupation, ni ses modalités.

L’événement est doublement préoccupant. Il questionne d’une part les pratiques de la commune en ce qui concerne la lutte contre l’insalubrité des logements et d’autre part, les procédures d’expulsion administratives ordonnées par le Bourgmestre. Les habitants se trouvant dans des situations similaires sont pris dans des logiques antagonistes : s’ils décident de ne plus subir l’insalubrité et les logiques des marchands de sommeil dont ils dépendent pour se loger, ils risquent de subir de plein fouet les décisions des autorités publiques.

Il est avant tout utile de rappeler l’enjeu majeur que représentent les problèmes d’insalubrité en matière de logement. Le mauvais état d’une habitation peut, à des degrés diverses entraîner des conséquences sur la santé physique des occupants (intoxications, allergies provoquées par les problèmes d’humidité, saturnisme, etc…), mais également affecter leur santé psychique (dépression, claustrophobie, oppression mentale, etc). Par-delà ces problèmes sanitaires, l’insalubrité d’un logement occasionne également des coûts sociaux très élevés : violences familiales liées à l’exiguïté des lieux, absentéisme à l’école ou au travail, enfants à la rue, pertes d’emploi, divorces, hospitalisations ou encore surendettement. Le phénomène de l’insalubrité n’est pas négligeable : quatre enfants belges sur dix grandissent dans une habitation insalubre. Il apparaît dès lors nécessaire de soutenir les locataires ayant le courage de dénoncer les problèmes d’insalubrité dans leur logement et ce, malgré le rapport de force inégal entre propriétaires et locataires, malgré les risques de conflit, voire de perte du logement à la fin du contrat de bail.

Ainsi, de manière quasiment absolue, lorsque la DIRL est saisie et interdit un logement à la location, les arrêtés d’inhabitabilité ne sont pas assortis d’effets immédiats. Les baux continuant à courir, cela permet aux locataires de trouver une solution de relogement. Les locataires, après avoir occupé pendant des années un logement insalubre, ne sont ainsi pas doublement pénalisés.

Lorsque malgré tout, la commune procède à l’évacuation dans le cadre de la police spéciale, il apparaît essentiel d’informer les personnes expulsées dans un délai raisonnable de l’expulsion prochaine et d’assurer une concertation avec les personnes concernées pour trouver des solutions de relogement. Selon le droit international, l’expulsion d’une personne de son logement ne peut en théorie se faire qu’à des conditions très strictes et ce, même si dans le cas d’expulsion administrative, les locataires ne bénéficient pas des protections élémentaires garanties dans le cas des expulsions judiciaires. Expulser quasiment du jour au lendemain une famille qui doit quitter un logement sans avoir le temps pour se préparer représente un acte particulièrement violent et traumatisant. Invoquer l’urgence alors que parfois les personnes vivent depuis des années dans le logement n’a pas beaucoup de sens

Dans le cas d’espèce précité, il apparaît une absence flagrante de communication entre les services sociaux, communaux, de police et le cabinet du bourgmestre, et absence de diligence pour transmettre les informations aux principaux concernées. Aux simples questions : « Quand aura lieu l’expulsion ? Y-a t’il une solution de relogement pour la famille et sous quelles conditions ? », aucune réponse n’est apportée.

Concernant la question spécifique du relogement, le bourgmestre se doit de veiller à ce que les conditions de logement des occupants soient meilleures après l’expulsion qu’avant. La question du relogement est véritablement cruciale dès lors qu’elle peut dissuader les différents organismes d’intervenir et faire échouer les initiatives relatives à améliorer la salubrité. Une expulsion administrative sans solution de relogement durable ne peut qu’entériner le fait que les relations locatives sont dès la départ biaisées dans la mesure où les personnes n’ont pratiquement aucun moyen de faire valoir leurs droits et sont contraintes de revoir leurs attentes à la baisse en matière de logement.

Pour rappel, le Code bruxellois du logement prévoit en son article 12 que « les locataires obligés de quitter un logement qui ne respecte pas ou plus les exigences de sécurité, de salubrité et d’équipement, ont un droit d’accès prioritaire aux logements gérés par les pouvoirs publics », tout en réaffirmant en son article §2 que « les différentes autorités publiques concernées ont l’obligation d’examiner toutes possibilités de relogement de ces

locataires ». Par ailleurs, signalons que les logements pris en gestion publique « doivent être prioritairement proposés aux locataires amenés à quitter une habitation ne répondant pas aux normes de sécurité, de salubrité et d’équipement ».

Enfin, l’ensemble de ces constats sont d’autant plus interpellants que les bailleurs sont, par ailleurs, peu sanctionnés et ne contribuent pas à solutionner le problème alors qu’ils portent une lourde responsabilité. La fermeture seule n’est pas d’office une sanction pour le bailleur, mais bien pour les locataires. D’ailleurs, il arrive même que, suite à l’expulsion, la rénovation soit facilitée sans bénéficier aux premiers concernés.

Monsieur le bourgmestre, j’ai donc quatre questions pour vous :

  • Combien d’arrêtés d’inhabitabilité sont pris dans votre commune pour des logements déclarés insalubres ?
  • Quelle est la procédure exacte lorsqu’un tel arrêté est pris ? Comment les locataires sont-ils prévenus, quelle est la prise en charge proposée ?
  • Combien de personnes sont relogées de manière durable suite à ces expulsions et dans quel type de logement ?
  • Enfin, comment les propriétaires qui mettent en location ces logements insalubres sont-ils sanctionnés ?

La teneur des réponses devrait être reprise prochainement dans un PV du conseil communal : https://etterbeek.brussels/fr/publi...

Voir en ligne : stopexpulsions.be

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