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...And City for All ?

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Bruxelles | sur https://stuut.info

Il n’y a jamais vraiment d’entracte dans les travaux de nos villes, toujours un petit quelque chose à faire, « moderniser », « revitaliser », « régénérer le tissu urbain », « embellir », « mixifier », « rendre la ville aux habitants »… Autant de formules qui sont souvent synonymes, sans jamais le dire, de ce mécanisme déloyal et sournois par lequel les populations des quartiers populaires sont volontairement remplacées par une couche sociale plus aisée. Il est rare que la réorganisation de l’espace urbain soit seulement une question de paysage, et pourtant les processus de gentrification sont toujours présentés à leurs victimes comme « naturels ». Face à cette arme silencieuse des politiques urbaines, filmer reste une manière judicieuse de mettre en lumière ces processus peu visibles, de laisser une trace de ce qui a été...

Ce mois-ci, le Cinéma NOVA vous propose quatre films de fiction venus des Etats-Unis, inédits en Belgique, tous nourris par le réel et portant des regards singuliers sur la gentrification telle qu’elle sévit à Washington, Portland ou dans la ville imaginaire de Checkford ; ainsi qu’un film sur la transformation de l’avenue de Stalingrad à Bruxelles, comme le miroir d’une histoire commune à toutes les villes du monde.

A Bread Factory Part 1 - Ce qui nous unit
Patrick Wang, 2017, US, 16mm > video, vo st fr, 122’

Il y a quarante ans, dans la petite ville de Checkford, Dorothea et Greta ont transformé une usine à pain désaffectée en un espace dédié aux arts : c’est La Bread Factory, dépositaire d’une certaine idée de l’éducation populaire. Mais May-Ray, un couple célèbre d’artistes-performeurs chinois est arrivé en ville et menace de récupérer les subventions culturelles permettant de faire vivre ce lieu. Non sans humour, la communauté de personnages hauts en couleurs qui fréquentent la Bread Factory tente de la faire survivre… Film artisanal réalisé par le très inspiré et inclassable réalisateur new-yorkais Patrick Wang, « A Bread Factory » a été nourri par la lecture de romans russes et leur propension à dépeindre des sagas familiales. D’abord imaginé comme une mini-série, de celles que Fassbinder, Rivette ou Bergman ont pu réaliser, il a finalement pris la forme d’un généreux diptyque. Un récit choral d’un humour et d’une poésie insensés, qui prend le temps, s’intéresse à la vie comme elle va, prête une attention précieuse à la psychologie de chacun de ses personnages, pour capturer l’essence d’une communauté et défendre l’importance sociale de l’art tout en pointant ses dérives élitistes.

28.01 > 19:00 + 30.01 > 21:00 + 05.02 > 21:00 + 20.02 > 15:30
6€ / 4€

A Bread Factory Part 2 - Un petit coin de paradis
Patrick Wang, 2017, US, 16mm > video, vo st fr, 120’

Checkford a bien changé depuis l’arrivée des célèbres May-Ray : les touristes affluent, l’immobilier flambe… A la Bread Factory, Dorothea et Greta travaillent sur l’adaptation d’Hécube d’Euripide. Mais le vrai spectacle se situe à l’extérieur et la Bread Factory est toujours menacée face à ces transformations de la ville. Dans ce second volet, Patrick Wang reprend les choses où il les avait laissées : en sursis. Ses personnages (animatrices, journaliste, teenager, acteur, critique, artistes contemporains…), toujours confrontés aux perspectives d’un monde qui change sous les effets du rouleau compresseur néo-libéral, défendent des conceptions antagonistes de la culture : divertissement, consommation, création… A l’instar du premier volet, les histoires, les détails et les anecdotes foisonnent dans une mosaïque de saynètes brillamment composées en plans larges, à hauteur des protagonistes. Mais cette fois, le mélange des genres est encore plus radical. Du drame satirique à la comédie sociale, du théâtre filmé à la comédie musicale, du manifeste politique au sitcom, du désespoir à l’espérance, Wang compose sa propre grammaire, poussant plus loin sa stimulante expérience cinématographique, et donnant encore plus de saveur et d’épaisseur à son récit. Un pur régal.

06.02 > 19:00 + 12.02 > 21:00 + 13.02 > 18:00 + 20.02 > 21:00
6€ / 4€

Property
Penny Allen & Eric Alan Edward, 1978, US, 16mm > video, vo st fr, 92’

L’Oregon, dans les années 1970. Dans la ville de Portland, un plan de développement urbain vise à transformer le quartier de Corbett, habité par nombre de locataires à bas loyers, d’afro-américains, de hippies, d’artistes... Cette petite communauté va se lancer dans un projet fou : acheter les terrains aux promoteurs afin d’éviter la démolition promise. La réalisatrice Penny Allen a habité Corbett quelques années plus tôt. « Property » est né de sa rencontre avec le chef-opérateur Eric Alan Edwards, et de leur intérêt commun pour les enjeux de l’urbanisation. Alimenté par les apports d’acteurs amateurs et professionnels, le film reconstitue à sa manière ce combat contre la gentrification. Au-delà, il est une trace remarquable de la vie communautaire à cette époque marquée notamment par la Beat Generation. Récemment ressorti en copie restaurée, « Property » fut lauréat au premier festival de Sundance. Et pour la petite histoire, Gus Van Sant y officie comme ingénieur du son. C’est d’ailleurs sur le tournage qu’il rencontra Walt Curtis, « le poète non officiel de Portland », qui outre jouer un rôle dans « Property », est aussi l’auteur de « Mala Noche », livre que Van Sant va alors dévorer puis adapter à l’écran pour son premier long métrage en 1985.

➞ Projections suivies d’une discussion avec Penny Allen le 29 janvier

29.01 > 18:00 + 29.01 > 20:30 + 06.02 > 21:00 + 12.02 > 19:00 + 20.02 > 17:00
6€ / 4€

Residue
Merawi Gerima, 2020, US, DCP, vo st fr, 90’

Jay nous emmène sur les traces des quartiers d’Eckington à Washington DC, métamorphosés par la gentrification qui y sévit depuis la fin des années 90, époque à laquelle il a quitté le quartier avec sa famille, fuyant la violence imposée par le trafic de drogue. Depuis, les habitants les plus modestes, majoritairement afro-américains, ont pour la plupart quitté le quartier, repoussés par le coût des loyers et les riches propriétaires blancs. Jay parcourt les rues et enchaîne les rencontres à la recherche de son meilleur ami d’enfance dans le but d’écrire un scénario sur son quartier. Comme un étranger, il avance dans ces rues, allant de réminiscences en prises de consciences, à la recherche de souvenirs et de visages familiers. Les stigmates du racisme et de la guerre de classe submergent le réel de Jay qui va découvrir sa propre violence. Les esthétiques se mélangent et les images se superposent, recomposant une mémoire singulière, comme les dernières traces d’une époque balayée. Merawi Gerima suit les traces de son père, le célèbre cinéaste éthiopien Haile Gerima, figure légendaire du mouvement cinématographique L.A. Rebellion faisant référence aux jeunes cinéastes africains et afro-américains qui ont créé un cinéma noir en alternative au cinéma hollywoodien.
28.01 > 21:00 + 05.02 > 19:00 + 11.02 > 21:30 + 20.02 > 19:00
6€ / 4€


Stalingrad avec ou sans nous ?

Liévin Chemin, Félicien Dufoor, Benjamin Delori, Samira Hammouchi, Chérine Layachi & Anas Ticot, 2021, BE, DCP, vo fr st nl, 63’

Stalingrad, une artère commerçante animée entre la Gare du Midi et la Place Rouppe. Mais depuis près de deux ans, les commerçants ont la gueule de bois face aux grues et aux pelleteuses qui transforment leurs terrasses en champ de labour pour installer la nouvelle station de métro « Toots Thielemans » (et pourquoi pas Stalingrad ?). Cette dernière s’inscrit dans le chantier pharaonique et dispendieux de la future (et discutable) ligne de métro 3 censée traverser Bruxelles du nord au sud. Dans le cadre d’un atelier du Centre vidéo de Bruxelles (CVB), cinq habitants, habitantes et riverains, riveraines du quartier filment les secousses et creusements subis par l’allée commerçante et posent la question « Avec ou sans nous ? ». Leur constat est amer. Ils ont le sentiment d’être « dépossédés » de leur quartier, lieu d’arrivage depuis des décennies d’une population maghrébine moteur d’une dynamique économique populaire. Les politiciens et les politiciennes se targuent, eux, de pouvoir « faire le bonheur des gens même contre leur volonté » en ayant le courage de « déghettoïser » un quartier.

➞ Projection suivie d’une discussion avec le collectif des cinéastes
06.02 > 16:00
6€ / 4€

Conférence gesticulée
J’habite, tu habites, ils spéculent...
Sarah De Laet, 2021, BE, fr 90’

Les conférences gesticulées ne sont pas inconnues du Nova qui organisait une semaine gesticulante en 2012 autour de cet objet hybride entre spectacle et conférence, sorte de « conte politique non autorisé » visant à dévoiler les systèmes de domination à l’œuvre tels que nous les avons vécus. C’est son parcours dans Bruxelles, son amour pour Starmania et la géographie urbaine qui ont conduit Sarah à se poser des milliers de question sur le pourquoi a-t-on tant de mal à se loger à Bruxelles et dans nombre de villes. « Dans les villes de l’an 2000 la vie ne semble pas plus facile ». Les loyers flambent, de plus en plus de personnes « vivent » en rue, peu de logements sociaux se construisent, des milliers d’expulsions ont lieu chaque année, et des bâtiments de logements chics pullulent... que se passe-t-il dans nos villes ? Si vous vous êtes déjà demandé pourquoi des bâtiments restent vides dans des villes chères, si vous vous demandez pourquoi les loyers ne font qu’augmenter, si vous avez un logement ou si vous n’en avez pas, venez !
12.02 > 17:00
6€ / 4€

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Analyse : quels enjeux autour du sans-abrisme à Bruxelles ?

Le sans-abrisme est une réalité préoccupante en Belgique, touchant des milliers de personnes à travers le pays. Les conditions hivernales particulièrement rigoureuses du début de l’année 2025, avec des températures particulièrement froides, ont rappelé la vulnérabilité des personnes sans logement face aux aléas climatiques. D’intenses chutes de neige ont eu lieu sur l’ensemble du territoire le mercredi 8 et le jeudi 9 janvier. A Bruxelles, les températures sont tombées sous la barre des –10C° la nuit du lundi 13 janvier. Une nouvelle fois, les premières personnes à être victimes de cette vague de froid ont été les personnes vivant dans la rue. Comme en 2024, une personne est décédée à Bruxelles le vendredi 10 janvier à la suite d’une hypothermie. En tout, en Belgique en 2024, ce sont près de 80 personnes sans abris qui ont perdues la vie dans la rue. Cette vie humaine arrachée est de l’ordre de la responsabilité collective et montre une nouvelle fois à quel point les personnes sans chez soi sont vulnérables face aux épisodes de grand froid. Les basses températures ne sont cependant qu’un facteur de mort parmi un grand nombre d’autres. Autant de facteurs qui rendent les conditions de vie dans la rue extrêmement difficiles. Si cette personne est directement décédée des températures négatives, de nombreux autres décès ne seront pas recensés par manque d’information. Lorsqu’une mort survient, c’est l’ensemble des conditions de vie et de survie d’une personne sans-abri qui est alors à pointer du doigt. Selon la Croix Rouge, le nombre de personnes sans-abris dans les rues de Bruxelles aurait presque quadruplé au cours des dix dernières années1. En août dernier, un dénombrement faisait état de 7.134 personnes. En réalité, beaucoup d’associations de terrain pensent qu’il y aurait plus de 10 000 sans abris à Bruxelles. Dans cette très large fourchette de personnes se trouvent des individus avec des besoins divers et variés. Pour exemple, sur l’espace de 20 ans, on est passé de 500 sans abris dénombrés à Bruxelles en 2000, sur lesquels environ 11 % de femmes, à plus de 5000 sans abris dénombrés, sur lesquels environ 23% de femmes, en 2023. Ces chiffres officiels montrent une hausse constante du nombre de sans abris. Les différentes méthodes qui ont permis d’effectuer des dénombrement ont toujours posé question quant à leur exactitude. Tout dénombrement implique des erreurs et des oublis, dus au contexte durant lequel il est réalisé. Par exemple, si un dénombrement se fait à une heure tardive, il est probable que les femmes sans abris soient moins facilement visibles que des hommes. Il est fréquent que des personnes sans-abris trouvent un hébergement qui ne peut pas être inclus dans un recensement (squat, amis, famille…). En bref, il est certain que la question du dénombrement est à prendre avec des pincettes tant celle-ci peut influer sur les moyens mis en place dans les secteurs d’aide aux sans abris. Hors le dénombrement, il est...

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Économie / Anticapitalisme

BlablaClasses n°9 Alternatives dans le logement : Vieillir autrement : repenser les lieux de vie pour plus d’inclusion

Dans cet atelier, nous nous questionnerons sur le vieillissement des personnes LGBT+ en institution. A quelles difficultés sont-elles confrontées ? Quels besoins spécifiques ne sont pas, ou peu, rencontrés ? Existe-t-il des alternatives ? Cet atelier sera animé par Marine. En formation d’ergothérapie, Marine consacre son travail de fin d’études à l’inclusion des personnes âgées LGBTQIA+ en maison de repos, en s’intéressant plus particulièrement à la formation des paramédicaux afin de lutter contre les discriminations. Au-delà de ce cadre, iel porte un grand intérêt à la réflexion et création d’alternatives d’habitation plus justes, sécurisantes et affirmatives pour ce public invisibilisé. Inscription juste ici : https://framaforms.org/blablaclasse-atelier-9-vieillir... 📣 D’octobre 2024 à juin 2025, les BlaBlaClasses auront pour thème la crise du logement à Bruxelles et les luttes pour un droit à un logement accessible et adapté à toustes. 🗣️ Les BlaBlaClasses sont des ATELIERS MENSUELS DE DISCUSSION ET DE RÉFLEXION en groupe sur le thème des oppressions et des privilèges liés à la classe sociale. On abordera ici l’impact du mal-logement sur les trajectoires de vie, on s’intéressera aux profits que réalisent les classes dominantes sur le dos des plus précaires. On se demandera en gros : A qui profite la crise ? Comment est-ce qu’on peut habiter dans tout ça ? Quelles sont les alternatives au modèle du logement tel qu’il est pensé aujourd’hui ? Ces ateliers ont lieu tous les deuxièmes jeudis du mois (ou presque) au Steki, à Saint-Gilles. L’OBJECTIF de ces rencontres est d’apprendre, comprendre, et s’éduquer ensemble. Des intervenant·es externes sont régulièrement invité·es aux ateliers pour partager leurs connaissances d’un enjeu ou d’une lutte en particulier. Pas besoin de connaître le sujet pour venir ! Nous demandons aux participant‧es de prendre part à ces ateliers dans une posture d’humilité, ouverte à la remise en question de leurs potentiels privilèges. La thématique “Logement” sera abordée en 3 cycles d’ateliers : La crise du logement Les luttes pour le droit aux logements Les alternatives au logement normatif Informations pratiques : 📅 Jeudi 12 juin 2025 de 18h30 à 21h (accueil de 18h à 18h30) 📍 Buvette associative Le Steki (rue Gustave Defnet, 4-6 – 1060 Saint-Gilles) 🚊 Arrêt Bethléem à 170 m (tram 81), arrêt Porte de Hal à 750 m (tram 3 et 4, bus 48 et 52) 💲 Événement gratuit, inscription recommandée ♿ Accès PMR via une rampe de 20% et assises sans accoudoir, toilettes non accessibles PMR. Pas de parking. 🍿 Quelques boissons (non alcoolisées) disponibles sur place (en cash uniquement) et vous pouvez également apporter de quoi grignoter. 💬 Pour tout besoin spécifique, contactez-nous.

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