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Portrait : BART DE WEVER- Un Premier ministre d’extrême droite pour un gouvernement en pleine fascisation

Portrait : BART DE WEVER- Un Premier ministre d’extrême droite pour un gouvernement en pleine fascisation

Belgique | sur https://stuut.info
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Le vendredi 31 janvier 2025, après 8 mois de négociation, un accord de gouvernement fédéral a été conclu en Belgique. Son issue, prévisible depuis le 9 juin dernier, est grave : la Belgique est désormais dirigée par un gouvernement dont on peut légitimement placer l’idéologie politique à l’extrême droite. C’est une première depuis la collaboration avec le fascisme allemand. Tout naturellement, c’est Bart De Wever qui en a pris la tête. S’il y a encore une dizaine d’années, l’homme d’extrême droite et chef du mouvement nationaliste et séparatiste flamand était plutôt décrié dans la presse, aujourd’hui on le présente comme « l’homme d’État » dont la Belgique aurait, peut-être, besoin. Pourtant, Bart De Wever n’a jamais dévié de sa trajectoire de militant d’extrême droite. Ou plutôt, c’est la société qui s’est « extrême-droitisée ».

Derrière son image qui se veut policée aujourd’hui, il y a une trajectoire marquée par des liens profonds avec des courants collaborationnistes, fascistes et xénophobes. De sa famille engagée dans la collaboration nazie à ses affiliations avec des cercles d’extrême droite, De Wever incarne une fascisation inquiétante du paysage politique belge. Et il est désormais aux manettes du pouvoir , avec la coalition Arizona. Plus sidérant encore, il n’y serait jamais parvenu sans l’aval de Vooruit, un parti qui se prétend « socialiste » alors qu’il ne cesse de trahir son électorat depuis des décennies. Hier, c’était l’acceptation du néolibéralisme, la casse des protections sociales et le virage sécuritaire. Aujourd’hui, c’est une alliance avec l’extrême droite. La « gauche » de gouvernement ne fait même plus semblant d’être du côté des travailleur·euse·s – elle préfère négocier son siège à la table du pouvoir, pour faire le jeu des pires politiques réactionnaires, quitte à y côtoyer ceux qui ont fait du mépris social et du racisme un programme politique.

1/ passé familial

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La famille de Bart De Wever est enracinée dans la collaboration nazie. En effet, son grand-père, Léon De Wever, était un membre du VNV (Vlaams Nationaal Verbond), un parti collaborationniste ayant travaillé main dans la main avec l’occupant nazi pendant la Seconde Guerre mondiale. Le VNV était le parti de Staf De Clercq. Durant la Seconde Guerre mondiale et l’occupation allemande, son objectif politique était de faire sortir la Flandre de la Belgique et d’en faire un état indépendant sous la protection du IIIe Reich d’Hitler. Il affirmait ouvertement l’intégration de la Flandre dans une Grande Allemagne aryenne. Ce mouvement nationaliste flamand soutenait directement la déportation des Juif.ves, leur génocide, et la répression sous l’occupation. Le VNV fut par ailleurs très actif dans le recrutement de soldats nazis, notamment pour la Waffen-SS. Il soutiendra même en hommes l’armée nazie lors de sa campagne militaire en URSS.

Après la guerre, Léon De Wever fut accusé de faits de « collaboration » avec l’occupant allemand et le nazisme. Il fut emprisonné, démis de ses droits civils et écarté de sa fonction d’enseignement. La famille De Wever en a gardé une rengaine à l’encontre de l’État fédéral belge et depuis, le père de Bart a toujours considéré la Belgique comme une « entité ennemie ».

Le père de Bart suit l’engagement de son père Léon et est lui-même très investi – même plus – dans le mouvement nationaliste et l’extrême droite. Bart décrit son père comme plus engagé que son grand-père, qu’il qualifie de « petit collaborateur« . En effet, Rik De Wever, a grandi dans cette haine et a poursuivi l’œuvre familiale en rejoignant la Volksunie, parti nationaliste et ancêtre de la NVA, puis en jouant un rôle central dans l’Alliance de la jeunesse nationale-flamande (VNJ), un mouvement de jeunesse inspiré des Hitlerjugend (Jeunesse Hitlérienne).

La VNJ (Vlaamse Nationaal Jeugdverbond) était un mouvement de jeunesse fondé par des individus issus des milieux collaborationnistes de la Seconde Guerre mondiale, dont certains avaient été membres de la Jeunesse hitlérienne. Destinée à encadrer et à former les jeunes nationalistes flamands, elle est rapidement devenue l’une des principales infrastructures de l’extrême droite en Belgique.

Proche du Vlaams Belang aujourd’hui, la VNJ entretenait également, dans les années 1970, des liens avec la mouvance néo-nazie anversoise et était officieusement considérée comme le mouvement de jeunesse de la Vlaamse Militanten Orde (VMO), un groupe paramilitaire néo-nazi et nationaliste flamand. Rik, le père de Bart, était une figure influente de la VNJ à Anvers et membre de la VMO. Il a contribué à la réintégration d’anciens militants néo-nazis qui avaient quitté la VNJ pour fonder un nouveau groupe avant de revenir en son sein. Ce mouvement a servi de creuset idéologique aux jeunes nationalistes flamands qui voulaient poursuivre l’œuvre de leurs ancêtres collaborationnistes.

De son côté, la Volksunie est un parti nationaliste flamand fondé en 1954. Il va réunir différentes tendances du nationalisme flamand, il aura plusieurs scissions d’extrême droite au sein du mouvement, comme le Vlaams Blok et le Vlaams Nationale Partij, mais aussi de groupe néo-nazis, comme la Vlaamse Militanten Orde (VMO). En 2001, le parti éclate et la N-VA nait à l’issu de sa disparition.

Les documents historiques révèlent également que Rik De Wever était en contact avec des organisations néo-nazies allemandes et a participé à des événements où se côtoyaient d’anciens SS et des figures du nationalisme identitaire flamand. Ce n’est donc pas un hasard si Bart De Wever a baigné dès son plus jeune âge dans une idéologie revancharde, hostile à la Belgique et nostalgique des « jours glorieux » de la Flandre fasciste. Effectivement, dès sa plus jeune enfance, Rik De Wever inscrit Bart au sein des rangs du mouvement nationaliste flamand, d’abord Volksunie et puis à la VNJ.

2/ Tel père tel fils ?

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Contrairement à ce qu’il prétend, Bart De Wever n’a jamais rompu avec cet héritage sulfureux. Après avoir été à la VNJ, lorsqu’il était étudiant, il a été membre de la Katholiek Vlaams Hoogstudentenverbond (KVHV). Un groupe étudiant catholique d’extrême droite néerlandophone, toujours à l’avant poste des mobilisations fasciste en Flandre. C’est d’ailleurs durant ces années militantes au sein de la KVHV qu’il prend sa fameuse photo avec le tortionnaire Jean-Marie Le Pen.

Notons, par ailleurs que Marion Maréchal Le Pen a célébré la nomination de 1er ministre de Bart De Wever en affirmant qu’elle allait renforcer l’alliance au niveau européen d’ECR, groupe de partis avec lequel la N-VA travaille. Le groupe ERC est notamment composé du parti néo-fasciste « Fratelli d’Italia » (Italie), celui « Identité-Libertés » (France) et celui PiS (Pologne).

Dans les années ’90 et 2000, il a activement participé à des cercles de débat où se retrouvaient des militants du Vlaams Blok (devenu Vlaams Belang), des négationnistes et des figures issues des groupuscules les plus extrémistes de la droite flamande, comme Bob Maes, ou les anciens dirigeants du Vlaams Blok Karel Dillen et Filip Dewinter.

L’un de ces cercles, le Vlaams Nationale Debatclub (VNDK), était un repaire de radicaux où furent invités des personnalités comme Jean-Marie Le Pen. De Wever y a joué un rôle plus qu’anecdotique : il figurait parmi les membres de la direction du club en 2000. Ce n’était pas une simple erreur de jeunesse, mais bien une adhésion assumée à un espace de promotion des idées xénophobes et ultra-nationalistes.

Les enquêtes de plusieurs médias antifascistes belges et internationaux ont démontré que ce club servait de passerelle entre la N-VA et les mouvements encore plus radicaux. De Wever, par sa présence et son rôle, a directement contribué à légitimer l’extrême droite et à créer des ponts entre le « nationalisme respectable » et les héritiers des anciens collaborateurs nazis, dans la continuation de son histoire et l’idéologie qu’il prône.

Preuve en est : en 2007, alors qu’il est depuis plusieurs années le président de la N-VA, il va déclarer que les excuses publiques de la Ville d’Anvers aux personnes Juives qui ont subit le génocide juif étaient « gratuites« . Le monde politique et médiatique est choqué. Il est alors accusé de négationnisme et d’antisémitisme.

De Wever et la N-VA, c’est aussi le développement d’une imagerie fasciste. On a vu défilé les images à la suite du 9 juin et de la victoire électorale de la N-VA. Bart, avançant d’un air triomphant entouré de ces partisans et d’un … aigle romain, brandissant avec ces doigts un « V ». Qui ne symbolise certainement pas la paix, mais plutôt la victoire de l’empire romain et le « V » de Vlaandere. L’empire romain, ses images, son aigle, son histoire de conquête et de domination a souvent été récupéré et utilisé comme référence par les fascistes (le terme fascisme est issu lui-même de la société romaine) : par Mussolini bien-sûr qui revait de rétablir l’empire, mais aussi par le régime nazi et Hitler. De Wever tisse également des comparaisons entre le déclin de l’empire romain et l’immigration en son sein et ce qu’il décrit comme être aujourd’hui la situation en Belgique.

Le « V » symbolise également le slogan historique du nationalisme et l’extrêmisme de droite flamand « Alles Voor Vlaanderen, Vlaanderen Voor Kristus » (AVV VVK) soit en français « Tout pour la Flandre, la Flandre pour le Christ« .

3/ L’extrême droite au 10 rue de la Loi

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Cette liste d’éléments (non exhaustive) nous montre bien à qui nous avons affaire. Son histoire, ses idées, ses ambitions. Bart De Wever est d’extrême-droite, possède et entretient un héritage et des liens avec des fascistes et … il est le chef de l’Etat Belge. Son ascension marque un tournant inquiétant dans l’histoire de notre pays. Ce n’est pas seulement un clivage politique qui s’ouvre, mais une fracture idéologique et politique notoire.

Sources :

  • Apache. « De politieke roots van Bart De Wever. » Apache, 14 mai 2013. Disponible ici .
  • La Libre Belgique. « Bart De Wever : Chronique d’une ambition. » La Libre Belgique, 19 août 2016. Disponible ici .
  • La Libre Belgique. « Jan Jambon (N-VA) a menti sur ses liens avec l’extrême droite. » La Libre Belgique, 3 déc. 2014. Disponible ici .
  • L’Avenir. « Marion Maréchal et le groupe parlementaire ECR félicitent Bart De Wever. » L’Avenir, 2 févr. 2025. Disponible ici .
  • Le Soir. « Bart De Wever, du diable à l’homme d’État. » Le Soir, 1er févr. 2025. Disponible ici .
  • RTBF. « Bart De Wever, de leader nationaliste à Premier ministre. » RTBF, 3 févr. 2025. Disponible ici .
  • RTBF. « Les membres de Vooruit approuvent la participation du parti au gouvernement De Wever. » RTBF, 3 févr. 2025. Disponible ici .
  • Wikipedia. « Katholiek Vlaams Hoogstudentenverbond. » Wikipedia. Disponible ici .
  • Wikipedia. « Ligue Nationale Flamande. » Wikipedia. Disponible ici .
  • Wikipedia. « Vlaamse Militanten Orde. » Wikipedia. Disponible ici .
  • Wikipedia. « Vlaams Nationaal Jeugdverbond. » Wikipedia. Disponible ici .
  • Wikipedia. « Volksunie. » Wikipedia. Disponible ici .

Voir en ligne : BXL Dévie

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