Le Vlaams Belang (parti d’extrême droite flamand) a déposé une proposition de loi au parlement fédéral ce 25 novembre 2024 visant à étendre la liste des organisations terroristes en Belgique. Dans son viseur ? Le mouvement anti-raciste Black Lives Matter (BLM), le mouvement antifasciste et le mouvement écologiste XR (Extinction Rebellion) … Si cette proposition était votée, cela provoquerait une dissolution/interdiction des mouvements précités, voir des poursuites envers les militant·es engagé·es dedans. Soulignons d’entrée que ce genre de proposition a peu de chance de passer à l’heure actuelle.
Comment le VB justifie t-il cette extension ? Au sujet de l’antifascisme, le parti nous explique : “Contrairement à ce qu’indique son nom, le Front Antifasciste (Antifa, AFF) est une organisation foncièrement fasciste qui ne jure que par l’intimidation et la violence physique contre quiconque ne pense pas comme elle.” On retrouve la rhétorique habituelle de l’extrême droite : les vrais fascistes seraient non pas les organisations qui cherchent à mettre en place un régime discriminatoire et autoritaire mais bien celles et ceux qui s’opposent à leur dessein. Faut-il s’étonner de ce genre de propositions de loi de la part d’un parti qui est l’héritier du Vlaams Blok, une organisation dissoute pour discrimination raciale ? De plus, Ortwin Depoortere, l’auteur principal de la loi, était lui même dans sa jeunesse un amateur des saluts nazis lors de soirées avec ses ami·es [1]. Le Vlaams Belang cherche simplement à interdire les organisations qui s’opposent à lui le plus frontalement.
Pour ce qui est de BLM, voici comment le parlementaire se justifie : “Les manifestations de BLM – auxquelles participent souvent des groupes d’Antifa – ont aussi souvent dégénéré en violences graves en Belgique. En mars 2021,pas moins de 36 agents ont été blessés lors d’actes de violence graves commis par des manifestants BLM à Liège. En juin 2020, une manifestation BLM organisée à Bruxelles a également été à l’origine de violences graves et la police a de nouveau délibérément été prise pour cible.” Pas un mot sur l’origine de la colère populaire qui s’est exprimé ces jours là, à savoir le racisme de l’institution policière, qui débouche parfois sur la mort de personnes racisées (juin 2020, c’est seulement deux mois après la mort d’Adil, qui avait ébranlé Anderlecht).
La dernière cible du VB est le mouvement XR – un mouvement écologiste international de désobéissance civile qui se revendique comme non-violent … Qu’on soit d’accord ou non avec les méthodes d’action de XR, le raisonnement du Vlaams Belang frise, là encore, le ridicule : “On considère souvent, à juste titre, en temps de guerre, qu’endommager ou détruire délibérément le patrimoine culturel et historique constitue un crime de guerre caractérisé. Nous songeons par exemple au dynamitage des Bouddhas de Bamiyan par les talibans, à la destruction du mausolée séculaire de Tombouctou, également commise par des terroristes islamistes, ou à la destruction d’œuvres d’art antiques en Irak et en Syrie par des terroristes de l’État islamique (EI). C’est la raison pour laquelle nous estimons que les dégradations délibérées d’œuvres d’art telles que celles que commet régulièrement XR devraient également être considérées comme des actes terroristes contre l’humanité.” Là encore, pour les parlementaires du VB, peu importe les motifs – le réchauffement climatique, la dégradation ultra-accélérée de la biosphère, … il y a lieu de considérer comme terroristes ceux et celles qui s’y opposent puisqu’iels dégradent des œuvres d’art.
Il y a peu de chance qu’aujourd’hui ce type de proposition passe au vote. Même pour la droite radicalisée (NVA & MR), ce genre de proposition repose juridiquement sur des constructions argumentaires fallacieuses. Cependant, on doit comprendre que ce type de proposition de loi a pour unique but que d’ouvrir toujours plus à droite la fenêtre d’Overton (ce concept désigne le spectre des idées considérées comme acceptables ou légitimes dans une société à un moment donné, qui peut évoluer sous l’influence de débats publics, de médias ou de mouvements sociaux, par exemple). De plus, il permet de désigner l’ennemi intérieur que sont pour le VB les mouvements écolo, anti-raciste et antifasciste. Cela permet de flatter leur électorat voir de justifier des agressions envers les militant·es de ces mouvements : puisque la loi ne protège pas les fascistes, quoi de plus logique que ceux et celles-ci se défendent par eux et elles-mêmes ?
Sources :
https://secoursrouge.org/belgique-le-vb-veut-classer-terroriste-les-antifas-blm-et-xr/ )
complements article
Une question ou une remarque à faire passer au Stuut? Un complément d'information qui aurait sa place sous cet article? Clique ci-dessous!
Proposer un complément d'info