Mass deportations of people of Moroccan origin
Collectieve uitzetting van mensen van Marokkaanse afkomst
Nous apprenons que huit personnes d’origine marocaine ont été mises de force sur un vol vers le Maroc ce mardi 19 novembre 2024.
La veille, le lundi 18 novembre 2024, des agent·es de sécurité sont venu·es chercher violemment et par surprise plus d’une dizaine de détenu·es d’origine marocaine dans les centres fermés de Merksplas et de Steenokkerzeel. Ils et elles ont été emmené·es au centre 127bis, et l’Office des étrangers a essayé de les mettre de force sur un vol le lendemain, le mardi 19 novembre. Certaines personnes ont réussi à éviter l’expulsion en faisant une demande de protection internationale, d’autres en s’automutilant avant le départ.
Il semblerait que les personnes qui ont été sélectionnées pour cette expulsion collective étaient des hommes et femmes qui résistaient contre leur enfermement dans les centres fermés (par des tentatives d’évasion, des passages à l’action, des résistances à des précédentes tentatives d’expulsion, des grèves de la faim). Huit personnes ont finalement été expulsées.
Un accord avec le Maroc
Nicole de Moor, secrétaire d’État à l’Asile et à la Migration, s’était rendue au Maroc en avril dernier pour conclure un accord avec les autorités marocaines. Cet accord avait pour objectif de trouver un compromis afin d’expulser des personnes marocaines en situation dite « illégale » en Belgique.1
Plus récemment, il y a quelques jours, de Moor se félicitait d’avoir, en 2024, multiplié par quatre le nombre d’expulsions de personnes ressortissantes du Maroc, témoignant d’un travail conjoint entre l’Office des étrangers et les ambassade et consulat du Maroc. Sur son compte Twitter, elle affirme : « La gestion de la migration ne se fait pas toute seule. Une approche globale de l’économie, de la sécurité, de la migration et du retour après la mission d’avril porte ses fruits. »2.
Suite à cet accord entre la Belgique et le Maroc, de nombreuses personnes marocaines ont donc été arrêtées, placées en détention en centres fermés, et également trop souvent expulsées. Beaucoup d’entre elles vivent d’ailleurs en Belgique avec leur famille depuis parfois des dizaines d’années, et n’ont pas forcément d’attaches dans leur « pays d’origine ».
Certain·es résistent à ces enfermements par des manifestations et des actions. D’autres, en signe de protestation ou de désespoir, entament des grèves de la faim, s’automutilent, ou vont jusqu’à tenter de mettre fin à leurs jours.
La double peine : de la prison vers le centre fermé
Récemment, Nicole de Moor affirmait que « Cette année, 203 personnes ont déjà été renvoyées de force, dont 113 personnes après avoir été libérées de prison. »3. Cette affirmation illustre l’amalgame fait par l’État raciste et répressif, qui entretient l’image publique négative des personnes privées de titre de séjour en les présentant comme des « criminel·les ».
En réalité, les personnes en séjour dit « illégal » sont plus facilement dirigées vers la prison. Elles sont d’abord davantage ciblées par les contrôles et la répression policière. Ensuite, lorsqu’elles sont condamnées à des peines diverses, elles bénéficient plus rarement, comme l’explique bien l’Observatoire International des Prisons (section belge) dans sa dernière publication4, d’alternatives à la détention en raison de leur statut de séjour. Elles sont donc plus systématiquement détenues (et ce, également de manière préventive) et obligées d’aller « à fond de peine ». Elles sont ensuite effectivement libérées de prison, après avoir purgé leur peine donc, mais elles sont directement transférées en centre fermé. Elles subissent alors une double peine5.
Parmi les personnes condamnées à des peines de prison, certaines d’entre elles étaient détentrices d’une double nationalité, belgo-marocaine dans ces cas-ci. Une fois condamnées, ces personnes se voient retirer leur nationalité belge. Elles se retrouvent donc sans titre de séjour légal en Belgique, ce qui justifie pour l’État belge leur transfert vers un centre fermé, puis leur expulsion vers le Maroc (leur « pays d’origine » où elles n’ont d’ailleurs parfois jamais mis les pieds).
Un homme d’origine marocaine, soumis à cette double peine, témoigne : “Qu’est-ce qu’ils attendent de moi ? Le Maroc ne veut pas de moi. Qu’est-ce qu’ils veulent gagner avec ça ?“
“On est traités comme une serpillière parce qu’on a les yeux noirs ? J’ai connu le racisme depuis mon enfance ici, mais enfant, on passe au-dessus de ça. Là je vois, j’entends. C’est inhumain.“
“J’ai payé pour mes conneries, on me donne pas une deuxième chance ? Ça marche pas si on reste calme ici. Je perds mon cerveau.“
Les expulsions
En vue d’être expulsées vers leur « pays d’origine », certaines personnes sont mises de force dans un vol régulier. Ces expulsions sur des vols « classiques », avec la compagnie Royal Air Maroc, sur le vol de 18h35 vers Casablanca, sont presque devenues quotidiennes.
Certaines personnes tentent de résister à l’expulsion en s’automutilant, en avalant divers objets ou encore en alertant les passager·ères du vol en demandant leur soutien. Certains d’entre elles subissent souvent plusieurs tentatives d’expulsion, auxquelles elles résistent.
Il arrive également de plus en plus souvent que plusieurs personnes soient mises de force dans le même vol régulier. Chaque personne expulsée est escortée de deux policier·ères. En juin dernier, des personnes nous ont d’ailleurs témoigné d’une expulsion collective extrêmement violente6 : “Un jeune homme d’une trentaine d’années au visage pâle et aux globes oculaires entourés de bleu et de rouge, avec une dent cassée (une incisive), a été débarqué de l’avion à Casablanca. J’ai appris qu’il a été victime de torture et d’agressivité juste avant qu’il soit sorti de son cachot après cinq jours d’enfermement au centre de détention à côté de l’aéroport de Zaventem. Son corps présentait des traces de coups, tacheté presque partout par des couleurs bleu et rouge foncé. Ligoté par les pieds et les mains, il a été transporté jusqu’à son siège dans l’avion où on continuait toujours à lui donner des coups et à l’écraser. Dans l’avion, on lui pressait les yeux avec les doigts d’une façon atroce. Les policiers ont couvert son visage avec une couverture et plusieurs fois, il a subi des tentatives d’étranglement”
Parfois, des déportations collectives sont organisées dans des vols « spéciaux », ou « vols charter », donc des avions spécialement réservés pour l’expulsion. Des personnes témoignaient avoir été sept à être déportées le 2 octobre 2024, sur un vol spécial vers le Maroc.
Et encore ce 19 novembre 2024, nous apprenions l’expulsion collective de 8 personnes d’origine marocaine. Pourtant, suite à son accord avec les autorités belges en avril dernier, le Maroc affirmait le contraire : « Mais le Maroc pose ses limites. Il n’est par exemple pas question de “vols spéciaux”. Travailler avec des vols réguliers avec un maximum de cinq personnes à bord est toujours possible. »1. On constate que la réalité est toute autre : des expulsions de masse, de plus en plus régulières.
#NoBorder
#StopDeportation
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2 Traduction depuis le néerlandais de https://x.com/nicole_demoor/status/1859143514979787250?s=46
4 https://www.instagram.com/p/DCmio7zog_1/ ?igsh=NncwcWxwZTRtbTg4
5 https://www.gettingthevoiceout.org/nouvelles-des-centres-fermes-et-temoignages/
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