Le MR et son obsession sécuritaire : une nouvelle étape dans l’islamophobie institutionnelle
Le MR et son obsession sécuritaire : une nouvelle étape dans l’islamophobie institutionnelle
À l’issue du Conseil du MR ce lundi 16 juin, le parti a de nouveau choisi d’alimenter une narrative anxiogène autour de la communauté musulmane en Belgique. En réclamant un rapport « détaillé » sur l’influence des Frères Musulmans sur notre territoire, le MR pousse une stratégie politique clairement stigmatisante et suit l’influence de l’extrême-droite française, qui ne fait qu’attiser les peurs et renforcer les discriminations à l’encontre des citoyens musulmans.
Le Mouvement Réformateur se réfère au rapport français de mai 2025, qui décrit la Belgique comme un « carrefour européen de la mouvance frériste ». Une assertion lourde de sous-entendus, qui sert surtout à renforcer un climat de suspicion généralisée envers une partie importante de la population. Le parti réclame que « tous les services de l’État » soient mobilisés pour mener cette « étude approfondie », reprenant à son compte une démarche sécuritaire qui interroge par son caractère potentiellement liberticide et discriminatoire.
Dans ce discours, le partir de Georges-Louis dénonce « environ 200 activistes liés aux Frères Musulmans » et évoque des « territoires confisqués » à Bruxelles comme Saint-Josse ou Molenbeek, qualifiés de zones où « le contrôle des islamistes sur la population apparaît presque complet ». Ces accusations, portées sans nuance, participent à la construction d’un bouc émissaire. Elles occultent les réalités socio-économiques complexes et réduisent la pluralité des identités musulmanes à une menace homogène, ce qui est non seulement faux mais dangereux.
Une campagne islamophobe qui s’inscrit dans un agenda politique
Derrière l’apparente volonté d’« évaluer objectivement » la situation, c’est en réalité une stratégie d’exclusion et de stigmatisation que le MR poursuit. En ciblant explicitement les associations et quartiers à forte population musulmane, il participe à un climat de défiance qui alimente les discriminations et les violences. Ce type de discours renforce les amalgames entre religion, radicalisme et terrorisme, alors que la majorité des musulmans vivent et contribuent paisiblement à la société belge.
Par ailleurs, cette focalisation sécuritaire masque une absence criante de propositions concrètes pour améliorer les conditions de vie, l’intégration sociale ou la lutte contre les inégalités qui affectent ces quartiers. En instrumentalisant la peur, le MR évite de questionner les politiques économiques, sociales et urbaines qui sont pourtant au cœur des problématiques réelles.
L’appel à la « neutralité de l’État » comme prétexte à l’exclusion
Le MR justifie cette démarche au nom de la défense des « valeurs libérales et démocratiques » et de la « neutralité de l’État ». Mais derrière ces mots se cache souvent une vision réductrice qui cible la visibilité religieuse musulmane dans l’espace public et qui légitime des mesures discriminatoires. Le fait de confondre lutte contre le radicalisme et contrôle de toute manifestation d’identité musulmane est une dérive dangereuse.
Le parti condamne par ailleurs « les menaces de mort à l’encontre de ses élus », tentant de se poser en victime pour légitimer son discours, alors même que ce type de rhétorique alimente la polarisation sociale et accroît les tensions.
En Belgique, l’État est tenu à une stricte neutralité. Cela signifie qu’il ne doit ni favoriser ni discriminer aucune religion, conviction philosophique ou identité. Cette neutralité garantit à toutes et tous la liberté de conscience et d’expression dans le cadre des institutions publiques.
Cependant, cette neutralité s’applique uniquement à l’État et à ses agents dans l’exercice de leurs fonctions. Les citoyens, eux, restent libres d’exprimer leurs croyances, leurs convictions politiques ou culturelles dans la société civile.
Un choix politique lourd de conséquences pour la cohésion sociale
En insistant sur la mise en place d’une coordination institutionnelle « renforcée », le MR signe sa volonté d’intensifier la surveillance ciblée et les contrôles renforcés dans certains quartiers, au risque d’approfondir la fracture sociale. Cette stratégie risque aussi de créer un effet de suspicion généralisée contre toute expression politique ou sociale liée à la communauté musulmane, au lieu de favoriser un véritable dialogue inclusif.
Plutôt que d’attiser les peurs et stigmatiser, il serait urgent que les responsables politiques s’engagent dans des politiques sociales, éducatives et culturelles concrètes, qui favorisent la cohésion, le respect des droits fondamentaux et la lutte contre toutes les formes de discrimination.
Le choix du Mouvement Réformateur illustre malheureusement une islamophobie institutionnelle croissante qui fragilise la démocratie belge en dressant une partie de ses citoyens les uns contre les autres. C’est un signal d’alarme pour la société toute entière.
Voir en ligne : En Bref
Notes
DANS LES MÊMES THÉMATIQUES

RÉPRESSION : DES ACTIVISTES POURSUIVI·ES POUR AVOIR BLOQUÉ UNE ENTREPRISE D’ARMEMENT ISRAÉLIENNE EN BELGIQUE
Le 4 mars 2024, une centaine d’activistes a bloqué le site de OIP-Elbit Systems, une entreprise d’armement israélienne pour dénoncer la complicité belge avec le génocide en cours en Palestine. Depuis, des poursuites judiciaires ont été entamées et 7 activistes font face à un procès pour leur participation au blocage. L’entreprise OIP exige des activistes des dédommagements, ce qui les expose à 70 000 euros d’amende. Le jour du blocage, deux entreprises avaient été visées en Belgique : OIP-Elbit à Oudenaarde et Thalès à Herstal. Les collectifs qui avaient organisé l’action expliquaient s’attaquer à ces entreprises car elles « produisent des armes, des technologies militaires ou de surveillance utilisées par le régime d’apartheid israélien et sont complices du génocide en cours à Gaza ». À défaut d’un embargo belge au niveau politique, les activistes ont voulu mettre en oeuvre un embargo citoyen en s’attaquant au matériel de ces entreprises. Les activistes rappelaient que OIP est une filiale du producteur d’armes israélien Elbit Systems, qui est le plus grand fabricant d’armes privé d’Israël : « Elbit fournit 85 % des drones et la plupart des équipements militaires terrestres utilisés par l’armée israélienne. La multinationale de l’armement française Thalès entretient quant à elle des relations de longue date avec Israël et collabore avec Elbit System. » En septembre 2025 avait lieu un premier procès : celui de la militante Anuna De Wever, pour des graffitis réalisés sur le site de l’entreprise OIP à Tournai en décembre 2023 et pour le motif « d’association de malfaiteurs ». Ce 21 octobre 2025, le verdict est tombé : suspension du prononcé pour les graffitis et Anuna De Wever a finalement été acquittée de l’accusation « d’association de malfaiteurs ». Avec ses avocates, elle entreprend désormais un procès à l’encontre de OIP–Elbit pour complicité dans un génocide. Entre-temps, se déroule une autre affaire juridique : celle de 7 activistes qui ont participé à l’action de blocage en mars 2024. OIP-Elbit les poursuit et réclame des sommes pour compenser les pertes financières mais aussi lesdits « dommages moraux » à l’issue du blocage de 2024. Les activistes visés et leurs camarades de Stop Elbit maintiennent toutefois leur ligne : « Nous refusons de laisser une compagnie israélienne fabriquer en toute impunité des armes sur le territoire belge. […] Aujourd’hui Elbit nous poursuit en justice et nous demande des indemnités. Ne les laissons pas gagner. » Le procès a lieu le 16 février 2026. Les activistes appellent au soutien le jour du procès mais aussi à un soutien financier, et à rejoindre les actions de Stop Elbit. Ce procès s’inscrit dans la criminalisation des personnes qui se prononcent publiquement en opposition au génocide en cours en Palestine et à la complicité de l’état belge dans ce génocide, notamment via des matériaux d’armement. En Belgique, le projet de la loi dissolution (ou loi Quintin) s’inscrit (...)
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