
La page Instagram d’éducation antiraciste @sansblancderien (devenue plus tard @estelle.depris) a été supprimée pour la huitième fois par Meta (groupe auquel appartient Instagram). Meta a récemment été vivement critiqué pour les prises de positions et discours réactionnaires de Mark Zuckerberg, dirigeant du groupe Meta. En revanche, rien de nouveau ici : Instagram censure un discours antiraciste, à plusieurs reprises et depuis des années.
Meta avait déjà désactivé la page @sansblancderien prétextant la publication d’un « contenu sensible ».
« Depuis octobre 2023, j’ai subi neuf suppressions injustifiées de comptes Instagram liés à ma personne : sept désactivations de mon compte principal, une suppression de mon compte de secours, et une désactivation de mon compte personnel privé le 23 mars 2025. » – Estelle Depris, militante antiraciste derrière la page @sansblancderien
Dans les faits, Estelle Depris n’a jamais eu d’explication claire qui viendrait justifier la désactivation de son compte, malgré les prises de contact avec la plateforme. Il s’agirait d’une désactivation suite à des signalements orchestrés par l’extrême-droite. La page @sansblancderien a subi des attaques groupées avec pour but de faire désactiver son compte.
« En octobre 2023, des abonné·es m’ont alertée : un de mes posts avait été republié sur des comptes d’extrême droite peu avant sa suppression.«
Ces attaques sont non seulement venues mettre en péril le travail d’Estelle Depris et invisibiliser sa parole, mais elles ont également été accompagnées d’un harcèlement en ligne. Aujourd’hui encore, porter un discours politique en tant que femme, d’autant plus en tant que femme racisée, c’est prendre le risque de se faire harceler et de devoir quotidiennement faire face à une hostilité en ligne.
Instagram désactive donc la page parce qu’elle ne respecterait pas les « standards de la communauté ». Ce faisant, Instagram supprime de sa plateforme un compte qui se veut pédagogique, qui prône la fin des inégalités et des violences à caractère raciste.
Estelle Depris a réussi à récupérer son compte plusieurs fois, ou retrouver une audience sur des comptes back-up, mais elle explique aujourd’hui être fatiguée. Cela fait maintenant plus d’un an qu’elle publie moins que ce qu’elle voudrait en raison de la crainte de voir son compte se faire désactiver à nouveau. Pour récupérer son compte, il lui a fallu plusieurs fois mobiliser sa communauté, et lui demander d’écrire à Méta pour signaler une erreur et faire pression. Elle a changé de nom de page (de @sansblancderien à @estelledepris) espérant éviter certaines attaques et censures. Faire tout cela demande une énergie et du temps qu’elle n’a plus aujourd’hui, en attendant la prochaine vague de signalements et la prochaine suppression.
« Cette situation a un impact direct et durable sur : ma santé mentale, mon activité professionnelle (promotion de mon livre freinée, partenariats mis en pause), et la pérennité d’un travail suivi par plus de 107 000 personnes. Je m’autocensure de plus en plus. Et en m’autocensurant, je trahis malgré moi mon engagement.«
Pour soutenir le travail d’Estelle Depris, il est possible d’acheter son livre d’éducation antiraciste « Mécanique du privilège blanc : comment l’identifier et le déjouer ». Bien sûr, il est également possible de suivre la page back up @sansblancderien et de contacter Meta grâce au tutoriel en story à la Une sur ce compte. Enfin, partager le travail d’Estelle Depris, commenter et diffuser son contenu, est une manière de lui rendre la voix qu’elle porte sur Instagram depuis des années, même si les règles du jeu de l’algorithme sont fixées par des personnes qui ne veulent vraisemblablement pas lui laisser le droit à la parole et le droit d’exister sur leur plateforme.
« Ces bannissements ne sont pas une affaire individuelle. Ils posent un problème démocratique majeur. ls participent à une censure algorithmique silencieuse, qui affaiblit les contre-pouvoirs et marginalise les voix pour la justice sociale. […] J’espère que cette problématique sera enfin prise au sérieux, et que les plateformes mettront en place des solutions pérennes pour protéger les voix pour la justice sociale, et toutes celles et ceux qui s’engagent pour les droits humains, l’égalité et la démocratie. Au-delà des réseaux sociaux, c’est notre avenir politique qui est aussi en jeu. »
Sources :
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