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« Radicalisation » à l’école en Belgique : une obsession fabriquée au service d’un agenda politique islamophobe

« Radicalisation » à l’école en Belgique : une obsession fabriquée au service d’un agenda politique islamophobe

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Depuis plusieurs mois, les débats publics sont marqués par une surenchère autour des questions « d’islamisme » et de « radicalisme » à l’école. Les polémiques concernant le port de l’abaya, ou les élèves refusant de respecter des minutes de silence en France, ont été largement relayées par des figures de droite et d’extrême droite belges, qui y voient une opportunité de pousser leur agenda islamophobe. Pourtant, une analyse des chiffres et des faits révèle une réalité bien différente.

L’exemple des débats récents est révélateur. La ministre de l’Éducation, Valérie Glatigny (MR), a mentionné lors d’une intervention télévisée une supposée montée des extrémismes à l’école, évoquant des cas d’autocensure parmi les enseignant·es. Cependant, les chiffres montrent en réalité une situation bien moins alarmante. Depuis la rentrée, seulement 6 appels concernant la radicalisation ont été recensés parmi les 459 appels adressés aux équipes mobiles d’intervention. En comparaison, 235 appels concernaient des problèmes d’absentéisme et 177 des conflits divers. Cela illustre que les enjeux réels dans les écoles sont bien différents. Les années précédentes ne montrent pas non plus de hausse significative de ces signalements, le pic ayant été atteint en 2017-2018 avec 33 cas, une période marquée par le traumatisme des attentats.

Cette déconnexion entre les discours alarmistes et les faits soulève des questions. Pourquoi insister sur un phénomène aussi marginal ? Certain·es syndicalistes dénoncent un « pseudo-baromètre » utilisé par la ministre, jugé non-scientifique et orienté, pour alimenter des conclusions biaisées. Il semble évident que l’objectif n’est pas de répondre à une « crise » réelle, mais de créer un climat de peur, propice à des politiques discriminatoires.

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Comme l’explique le syndicaliste Luc Toussaint, ces débats sur la radicalisation religieuse sont récurrents et ne reflètent pas une problématique majeure sur le terrain. L’accent mis sur les écoles n’est pas anodin.

Les enfants et les adolescent·es, publics particulièrement vulnérables, deviennent les cibles de ce discours, car leur instrumentalisation permet de justifier des mesures restrictives et discriminantes au nom de la « neutralité ». Étant donné que les jeunes ne sont pas une priorité électorale, ils sont souvent relégués à des rôles passifs et instrumentalisés dans les discours politiques.

Cette stratégie s’inscrit dans une tendance plus large observée dans les sphères politiques conservatrices. À l’instar des propos de Pierre-Yves Jeholet (MR), ministre-président de la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui opposait le port du voile aux « valeurs belges », l’objectif est de polariser les débats pour rallier un électorat sensible à ces thématiques. En incarnant des positions d’extrême droite, certains partis cherchent à renforcer leur assise idéologique en Belgique, à l’instar du MR de Georges-Louis Bouchez.

Ces fausses polémiques surviennent alors que le nouveau gouvernement s’apprête à mettre en œuvre des mesures antisociales et à opérer des coupures budgétaires dans l’enseignement. Ces réformes incluent des suppressions de postes, une réduction des aides scolaires et des moyens alloués aux infrastructures éducatives, accentuant les inégalités et dégradant la qualité de l’enseignement public. Cette situation suscite un mécontentement croissant, notamment dans les milieux éducatifs.

Des manifestations et grèves ont déjà eu lieu dans le secondaire, où enseignant·es et élèves dénoncent la précarité grandissante et l’absence de solutions concrètes face aux véritables défis éducatifs. En détournant l’attention vers des débats identitaires, le gouvernement de droite espère ainsi masquer ces décisions impopulaires et désamorcer les contestations sociales qui pourraient en émerger.

Sources :

Voir en ligne : BXL Dévie

Notes

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