Extrême-droite / Antifascisme
#7 Lettre du Rojava : Bonbons, martyrs et coopératives
Cela faisait belle lurette que je n’avais plus pris la plume. Or, cela me fait du bien, ça m’aide à tenter de digérer un peu mieux l’aigreur de ce monde et puis je continue à espérer que ça puisse être un brin utile. Si j’ai levé le pied sur l’encre jetée sur mes idées c’est d’abord parce que ma situation ces derniers mois est assez particulière (m’ayant fort peu permis d’être au contact de la réalité sociale vécue au Rojava), mais aussi, soyons honnêtes, en raison de quelques doutes, me disant parfois que cela était futile (au vu des réactions clairsemées que mes écrits précédents ont pu susciter).
Ces doutes ont d’ailleurs aussi été alimentés par cette relative déconnexion avec le quotidien des ’gens d’ici’, imposée par les circonstances. Aussi paradoxal et honteux que cela puisse paraître, l’isolement relatif est propice à un égo qui se fraye, sournoisement, un chemin, au détriment d’une sensibilité empathique, quotidiennement aiguisée, envers ce qui se vit autour. Il y a eu des jours où j’ai pu, et j’en suis peu fier, en oublier la beauté et la dureté des combats menés dans ce coin du monde. C’est que lire des nouvelles sur ANF, même en étant proche des lieux, n’arrivera jamais à la cheville d’un regard, d’une poignée de main, d’un sourire pour, réellement, comme le préconisait le Ché : « Être capable de ressentir au plus profond de son cœur n’importe quelle injustice commise contre n’importe qui, où que ce soit dans le monde ».
Il y a quelques jours, a eu lieu la plus importante fête musulmane de l’année, l’Aïd elKébir (ou Aïd al-Adha), lors de laquelle la générosité et la solidarité avec les personnes les plus démunies est mise à l’honneur. Comme souvent, sans crier gare, un de mes responsables m’annonce : « On part dans 5 minutes, sois prêt ! ». Sans savoir la destination, nous prenons la route sous un soleil bien réveillé, ce que nous évitions de faire ces dernières semaines. Les déplacements exclusivement nocturnes étaient à nouveau de mise, au vu de la recrudescence des attaques de drones turcs, venues allonger, dans l’indifférence des grands médias occidentaux, la longue liste des assassinats politiques. Car, c’est bel et bien de cela qu’il s’agit, lorsque cette technologie meurtrière vient faucher la vie de femmes et hommes, élu.es locaux, enseignant.es, paysan.nes œuvrant au quotidien pour une société multiculturelle, aspirant à une authentique démocratie. Parmi les récentes victimes , des mulsulman.es et des chrétien.nes, des kurdes, des arabes et des assyrien.nes, conscient.es qu’aujourd’hui assumer des fonctions publiques, dans ce coin du globe, c’est courir le risque de voir l’armée du pays voisin réduire en poussière leur véhicule et leur existence. Ces attaques ciblées se font sans avoir à déplacer d’hommes ni à risquer la moindre remontrance d’une communauté internationale à l’indignation à géométrie décidément bien variable.
La première escale arrive très vite. Nous nous arrêtons à la ’Malbata Şehîd’ locale. Ces...
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