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Loi anti-casseur : chronologie d’un projet dangereusement liberticide

Loi anti-casseur : chronologie d’un projet dangereusement liberticide

Ce mercredi 14 juin, un projet de loi dite « anti-casseur » a été approuvé en commission à l’initiative du ministre de la justice Van Quickenborn. Vivement critiqué ce projet de loi représente une menace importante pour le droit de manifester. La loi doit cependant encore être votée au parlement pour devenir effective. La volonté de créer une loi anti-casseur en Belgique ne date pas d’hier et est régulièrement remise à l’ordre du jour, Nous vous proposons ici de retracer sa chronologie et son actualisation récente depuis les émeutes en marge des matchs du Maroc durant la coupe du monde.

Belgique | sur https://stuut.info | Collectif : Bruxelles Dévie

A la suite des émeutes qui ont eu lieu dans le cadre de l’après match Belgique-Maroc le 27 novembre 2022, plusieurs hommes politiques et ministres ont déclaré, à travers la presse ou sur les réseaux sociaux leur volonté de « casser les casseurs »1, en profitant de la polémique raciste. Cette réplique, non sortie du dernier film Brice de Nice, vient tout droit de la bouche de Georges-Louis Bouchez (GLB), qui n’hésite pas à reprendre à son compte des mesures portées par le Rassemblement National en France, pour s’attaquer à ceux et celles qu’il nomme les « casseurs ».

C’est dans une intervention en décembre 2022 pour le média LN24 que GLB faisait part du nouveau plan de sécurité du MR. Celui-ci visait à supprimer le plus d’aides sociales possibles à celles (inclusive)et ceux identifié·es comme casseur·ses : suspension du paiement des allocations familiales pour les mineur·es, du chômage pour les adultes et la fin de toute une série d’aides sociales, comme la gratuité des transports, les aides au logement, etc. Mais également de condamner le « non-respect du drapeau »*.1 L’objectif global du plan présenté était donc de faire des « casseur·ses », des citoyen·nes de seconde zone, qui ne bénéficieraient plus de la redistribution de l’Etat. Evidemment, la présentation de ce plan de sécurité pour le MR était plus électoraliste et opportuniste que sérieuse, elle a servi de planche pour aller surfer sur la même vague raciste que le Vlaams Belang, la N-VA, …

On s’en doute, GLB n’était pas le seul à vouloir « casser les casseurs ». Le ministre de la justice Vincent Van Quickenborn – qui, à titre de rappel, avait fait un tweet antisémite durant le carnaval d’Alost en 2020 et n’avait volontairement pas initié une enquête judiciaire dans le cadre d’un monument nazi en Flandre2 – est aujourd’hui à l’initiative du projet de loi. Il disait lui vouloir « responsabiliser les parents [des casseurs] » en supprimant les allocations familiales au moment des émeutes lors du match du Maroc. Il prétendait également vouloir mettre en place une procédure judiciaire accélérée. Celle-ci permettrait le passage devant un·e juge au bout d’une semaine de détention pour des faits de flagrants délits.3

De la même manière, c’est un projet loi régulièrement défendu par ledit socialiste Philippe Close, bourgmestre de Bruxelles. A la suite des émeutes en marge du CST en 2021, il avait plusieurs fois affirmé sa volonté de créer une loi anti-casseur.

En 2000, pourtant, à l’occasion de la compétition de foot de l’Euro, co-organisée par la Belgique, une tentative similaire de procédure accélérée pour les actes de « casse » avait été proposée mais annulée par la Cour constitutionnelle car elle posait d’évidents problèmes de droit de la défense et de traitement différencié des citoyen·nes : une personne qui passe en comparution immédiate devant la justice verrait ses moyens de se défendre considérablement diminués car la procédure judiciaire est trop rapide.

Denis Goeman, juge au tribunal de première instance francophone de Bruxelles expliquait que la personne en comparution immédiate « n’a pas la même possibilité de se défendre qu’une personne qui comparaît un mois après. Elle peut difficilement demander des devoirs d’enquête. Elle peut difficilement confronter ses versions avec celles d’autres protagonistes au dossier ».4 Le ministre de la justice avec sa procédure accélérée propose donc un projet dont nous savons déjà qu’il porte atteinte à la liberté de se défendre et qui est, au moins partiellement, anticonstitutionnel. Le « Projet de loi visant à rendre la justice plus humaine, plus rapide et plus ferme III » fourre-tout et portant en son sein la dite loi « anti-casseur », ne semble pourtant finalement pas reprendre les déclarations vis-à-vis de la procédure accélérée, ni celles vis-à-vis des aides sociales. Encore une fois, à l’instar de GLB, les déclarations du ministre de la justice à l’encontre des « casseur·ses » semblent être plus politiques que sérieuses.

Néanmoins, cette démarche illustre bien toute la dynamique autoritaire prise par la classe politique belge actuelle : augmenter le nombre d’outils pour exercer la répression plus rapidement, plus fermement, plus facilement et, ce, en surmontant toutes les barrières posées par le droit. Ce nouveau projet de loi, fera suite à la circulaire « tolérance zéro » de 2020 (V. Van Quickenborn) et à celle contre le droit de manifester de la ministre de l’intérieur Verlinden de 2022. La machine est en marche et cette machine est symptomatique de l’incapacité des politiques belges à répondre autrement que par la répression aux problèmes sociaux, à se questionner plus amplement sur ceux-ci.

Le gouvernement est tombé sur un accord, le PS et Ecolo (après avoir soutenu, puis affirmé qu’ils ne le soutenaient plus, …) soutiendront le projet de loi liberticide, moyennant des amendements protégeant soi-disant les libertés syndicales, d’organisation et d’actions, mais souscrivant et permettant en réalité à un projet de loi qui les attaque, bref un accord politique à la belge. Ecolo et le PS garantissent que « la liberté de manifester dans un but politique syndical, humanitaire, philosophique, environnemental, civique ou le droit de mener des actions collectives » sera inscrit dans le texte de loi.

Ils viennent fièrement dire s’être battus pour inscrire ces pauvres garanties, certainement sous le fruit de la pression syndicale et associative, qui ne doivent convaincre, par ailleurs, personne et qui n’empêcheront pas le projet de loi d’être liberticide, de menacer les grévistes, les écologistes, … et toutes celles et ceux qui sortent dans la rue.

En somme, ces amendements protègent relativement les actions de grèves tant que les grévistes, … ne bloquent pas leur lieu de travail (cf. la décision du tribunal de Mons interdisant tous les piquets de grève entravants sur le territoire), ne brulent pas de palette de bois devant le blocage, … Ils font passer la peine de récidive de 6, … à 5 ans, … font en sorte que l’interdiction de manifester ne s’appliquera pas aux évènements revendicatifs de moins de 100 personnes comme ça les syndicats et les associations comme Greenpeace pourront continuer à faire leurs actions pendant que tout le reste de la contestation sociale qui sort des sentiers battus – entendez, qui n’est ni associative et ni syndicaliste – sera sous le feu de la répression.

Bref, les politiques tentent de marchander avec les revendications des syndicats et du monde associatif pour atténuer leur opposition au projet de loi. Malgré tout, les syndicats et le monde associatifs ont réaffirmé leur opposition au projet de loi, le gouvernement espérait faire changer la donne.

A la suite de l’accord du gouvernement, le mardi 13 juin, Thierry Bodson (président de la FGTB) dans une interview pour LN24 disait que cette loi anti-casseur rate son objectif car les « casseurs » passeront entre les « mailles du filet » et finalement ce seront les grévistes qui brulent des palettes de bois devant chez Delhaize qui seront interdit·es de manifester. Si la FGTB est toujours opposée au projet de loi, elle joue ici le dangereux jeu du pouvoir en se déclarant contre les « casseur·ses » en les opposant aux dits manifestant·es pacifiques. Mais, ce que Thierry Bodson semble oublier, c’est que celles et ceux considéré·es comme des manifestant·es aujourd’hui seront considéré·es comme les casseur·ses demain, y compris les syndicalistes.

Le projet de loi anti-casseur prendra donc, et ce largement inspiré par la celle similaire en France, la forme d’une peine de probation autonome à l’encontre de personne ayant commis « des actes criminels » dans le cadre d’une manifestation. Les condamnations pour des faits qui vont de la dégradation de propriété immobilière au meurtre, en passant par les coups et les blessures pourront entrainer une interdiction temporaire du droit de manifester. Cette interdiction serait d’une période de maximum 3 ans, et 5 ans si récidive.

En plus de l’atteinte au droit de manifester, une partie du monde juridique dénonce ce projet comme inutile, car l’arsenal judiciaire pour condamner ce genre d’acte existe déjà (hormis la peine autonome d’interdiction de manifester), et que l’effectivité en terme de répression de cette loi, comme on le voit en France est très faible. Elle signe uniquement un tournant plus autoritaire pour l’état.

L’objectif à terme derrière cette loi, même adoptée avec les amendements du PS et Ecolo, est que la contestation sociale se limite à des manifestations protocolaires nord-midi, à ce que les grèves et les grévistes n’empêchent plus les entreprises de fonctionner et soit condamné·es si c’est le cas, que les jeunes qui marchent pour le climat ne développent jamais d’autres moyens d’actions et continuent à marcher, … finalement que tous les moyens de lutte qui dérangent l’Etat et les patrons soient interdits. L’objectif de ce projet loi, est d’amputer le droit à l’expression politique, notamment violente, dans la rue et lors d’actions, de faciliter le fichage et l’interdiction de la participation des opposant·es politiques aux manifestations. Or, précisément au sujet de l’usage de la violence c’est celle-ci, qui a en partie façonné notre système de sécurité sociale, permis les congés payés, de ne pas bosser plus de 8h dans la même journée, … Dans certains articles, ou chez les politiques qui commentent ou défendent ce projet de loi, il est indiqué que « les casseur·ses » sapent le droit de manifester aux pacifiques par leur usage de la « violence », mais comment pensez-vous, vous qui écrivez, que le droit de manifester a-t-il été gagné, imposé ? Justement, en partie, par ce même usage de la violence dans la contestation sociale, en tant qu’elle permet d’établir un rapport de force avec les autorités.

Ce projet de loi s’inscrit dans les processus dits « illibéraux » dans lesquels les Etats occidentaux sont pris, c’est-à-dire une transformation des démocraties bourgeoises libérales en des régimes de plus en plus autoritaires et policiers, n’assurant plus les libertés fondamentales (liberté de manifester, droits des minorités, droit de grève, …) mais gardant certaines caractéristiques de la démocratie représentative. Globalement, nous pouvons commenter que ces transformations dites « illibérales » sont en réalité des signes de l’avancée d’un processus de fascisation en Europe, qui peut se mesurer notamment au vu de l’évolution de l’agenda politique des gouvernements et de la manière dont ceux-ci se calquent sur celui de l’extrême-droite, vis-à-vis de la politique migratoire par exemple.

Certes, le climat fascisant européen n’aide pas à se poser des questions pour nos gouvernements, mais comment en sommes-nous arrivé·es-là ? Il est important de signaler la manière dont la politique belge arrange son agenda en fonction des racistes : si les émeutes des après-match du Maroc ont fait tant de bruit, ce n’est pas tant dû à leur violence, ni même à l’intensité des affrontements avec la police (qui étaient assez faibles en comparaison à d’autres évènements) ou encore à cause des dégradations. C’est parce qu’elles étaient le fruit de citoyen·nes issu.e.s des quartiers populaires et de l’immigration. Une importante lumière médiatique avait été mise sur ces évènements, en réalité grossie par les publicités payées de l’extrême droite sur les réseaux sociaux.

Effectivement, le Vlaams Belang, habitué à déverser sa propagande haineuse via les réseaux, avait dépensé 20 000 euros au moment des émeutes en marge des matchs du Maroc pour rendre virales les images et favoriser la promotion d’un discours islamophobe et xénophobe6. Une aubaine pour Vincent Van Quickenborn, Philippe Close et tous les autres de leur caste politique, qui y ont vu une occasion d’actualité pour remettre leur projet de loi anti-casseur, maintes fois soutenu, au gout du jour.

Aujourd’hui, ce projet de loi anti-casseur est largement rejeté par les syndicats, les associations (dont Amnesty et la Ligue des Droits Humains) qui luttent pour les acquis sociaux, les observateurices du droit et toute une partie de la population qui voit très bien quel chemin est en train de prendre l’Etat belge. De jour en jour, les acquis sociaux se décortiquent : droit de grève, de manifester, … et les outils répressifs étatiques augmentent. Il n’y a pas de solution miracle, tous les contre-pouvoirs de la démocratie représentative belge peinent à fonctionner correctement, et lutter pour conserver ces droits ne suffira pas. La seule réponse qui pourra être suffisante à la dynamique autoritaire prise, est une large offensive sociale sur tous les plans et une grande solidarité face à la répression.

*Le MR souhaite que « le non-respect du drapeau » belge soit puni pénalement. Nous ne savons pas bien, par quoi est défini le « non-respect du drapeau », il n’en mentionne pas un mot. A notre sens cette proposition de mesure sert à insinuer que les support·rice·er·s marocain·e·s ne respecterait pas la Belgique et sert donc l’idée d’un « ennemi intérieur ». Cette mesure confirme aussi le tournant de plus en plus à droite et réactionnaire du MR.

Sources :

  • [6] Le Vlaams Belang a dépensé 20.000€ sur Facebook pour rendre virales les vidéos d’émeutes après Belgique-Maroc – rtbf.be
  • Interdiction de manifester : le gouvernement trouve un accord pour la loi « anti-casseurs »
  • Proposition de loi (avant amendement) : Cliquer pour accéder à 55K3322001.pdf

Voir en ligne : Bruxelles Dévie

Notes

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