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Liège, 1er mai 1933
Contexte
En mai 1933, le fascisme est un phénomène politique bien tangible en Europe.
Hitler vient d’être nommé Chancelier, et en quelques mois, ses opposant·es de gauche sont déjà brutalisés, arrêtés, voire assassiné·es. En Italie, Mussolini est au pouvoir depuis 1922, avec son lot de répression sanglante.
Au sein de la communauté Italienne en Belgique, ayant fui ce régime, la majorité est antifasciste et continue à militer. On peut d’ailleurs lire ce message porté par des travailleur·euses italien·nes lors du 1er Mai 1926 à Liège : “Travailleurs, en ce jour, saluons les héros de la cause prolétarienne. Lavigni et Matteotti, assassinés par les chemises noires. Que le souvenir de la terreur de Turin et le carnage de Florence puisse vous unir dans la lutte contre le fascisme assassin. Vive le 1er Mai antifasciste.”
Au delà de la présence Italienne, l’antifascisme est bien présent en Belgique, notamment au sein de groupes militants comme le MDO (Milices de Défense Ouvrière) rattachés au POB (l’ancêtre du PS), ou encore au sein du parti communiste, qui s’organisent contre les groupes fascistes belges tel que la légion nationale.
Evénements
À Liège, le 1er mai est annuellement l’occasion de célébrer les luttes des travailleur·euses. Avec l’accession récente d’Hitler au pouvoir, l’antifascisme est clairement à l’ordre du jour en ce mois de mai 1933.
Avenue Blonden, près de la gare des Guillemins, le drapeau nazi flotte fièrement sur le balcon du consulat allemand. De nombreux manifestant·es s’en aperçoivent et, chose rare pour l’époque, les cortèges communistes et socialistes font spontanément jonction devant le bâtiment au son des huées.
Des pierres sont jetées sur la façade par la foule et les vitres du consulat éclatent. Les policiers chargent sabre au clair sur la foule mais sont vite repoussés (un policier est même complètement désarmé selon le récit du journaliste de la Meuse). Les manifestant·es ne lâchent pas l’affaire.
Une militante communiste de Seraing, portée sur les épaules, parvient finalement, dans la liesse générale, à arracher le drapeau à croix gammée. La manifestation reprend son cours, forte d’une grosse dizaine de milliers de personnes et finit sa route devant la maison du peuple. L’évènement fait la une des journaux du lendemain.
Conclusion
L’affaire ne s’arrête pas là. Quelques jours plus tard, le 13 mai 1933, Julien Lahaut, député communiste à la Chambre, s’emporte lors d’une de ses allocutions et brandit fièrement le drapeau nazi capturé en clamant : “Voilà le drapeau nazi qu’à Liège, ont arraché les ouvrier·ères communistes et socialistes unis. Quoi que vous fassiez, ils continueront, dans le pays, la lutte contre les menées des traîtres et des valets d’Hitler.” L’ambassadeur allemand exigera dès le lendemain des explications au ministre des affaires étrangères belge quant à ces incidents.
Même si sa portée ne fût que symbolique, l’évènement du drapeau allemand illustre l’effervescence de l’antifascisme des années 30, décennie marquée par de nombreuses confrontations et mobilisations autour de la lutte contre l’extrême-droite. De plus, l’épisode du drapeau reste un moment spontané d’union antifasciste entre tendances concurrentes, une union qui se renforcera les années suivantes autour de ce combat.
Sources
Dohet, J. L’antifascisme à Liège. Esquisse d’une lutte jamais abandonnée. Institut d’histoire ouvrière, économique et sociale.
Le Soir. 2 mai 1933. Consulté sur Belgicapress.
La Meuse. 2 mai 1933. Consulté sur Belgicapress.
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