Féminismes / Antipatriarcat
[France] MeToo de la marine marchande : les violences sexistes en mer jugées au pénal
Trois anciens salariés d’une compagnie maritime du Finistère comparaissaient du 22 au 24 avril pour des faits de harcèlement sexuel, agressions sexuelles, et harcèlement moral à bord de navires. Le premier MeToo de la marine.
Ils étaient quatre sur le banc des prévenus. Un ancien commandant, âgé de 61 ans, et un ancien chef mécanicien, 47 ans, jugés pour des faits de harcèlement moral et sexuel pour le premier, assortis de faits d’agression sexuelle pour le second. Du 22 au 24 avril, le premier procès MeToo de la marine a eu lieu au tribunal judiciaire de Brest.
La compagnie maritime brestoise Genavir, dont les deux hommes étaient salariés jusqu’en 2021, ainsi que son ancien directeur général étaient aussi sur le banc des prévenus. Ils devaient répondre de blessures involontaires et de discrimination professionnelle à l’égard de personnes ayant subi ou refusé de subir un harcèlement moral ou sexuel, pour des faits qui ont eu lieu entre 2017 et 2020 à bord des navires de l’entreprise.
Filiale de l’Ifremer (Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer), Genavir emploie près de 400 personnes, dont des marins et du personnel scientifique qui embarquent à bord de navires de recherche océanographique tels que Le Pourquoi pas ?, L’Atalante ou encore Le Thalassa. Ces missions en mer peuvent durer jusqu’à 45 jours.
Filmée à son insu
Dès 2017, des salariées ont signalé des violences sexuelles au travail. En 2021, l’inspection du travail de Genavir saisit le procureur. Le parquet de Brest ouvre alors une enquête, puis renvoie les quatre prévenus devant la justice pénale. Un fait rare dans les dossiers de violences sexistes et sexuelles en entreprise.
Au total, sept personnes, un homme et six femmes, anciennes ou actuelles salariées de Genavir et de l’Ifremer, ont mis en cause les prévenus. Trois d’entre elles, ont décidé de porter plainte et de se constituer parties civiles. L’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail, également partie civile, les accompagne dans d’autres procédures civiles toujours en cours contre Genavir. Durant le procès, ces femmes ont pris la parole tour à tour pour raconter les tentatives d’agressions, les agressions sexuelles et le harcèlement moral et sexiste à bord.
Cet article est publié en partenariat avec Lisbeth, média féministe indépendant. Juliette, l’une des plaignantes, raconte comment Christophe M., son supérieur hiérarchique, l’a filmée à son insu alors qu’elle nageait en maillot de bain, dans la piscine du navire, le tout sur son temps de pause. Le lendemain, alors qu’il lui montre la vidéo prise sur son téléphone, le sang de Juliette se glace. « J’ai ressenti une grande honte, j’ai été incapable de parler de cette vidéo à quiconque », a-t-elle témoigné à l’audience.
En plus de la vidéo, elle découvre sur le téléphone de son supérieur, d’autres photos d’elle, toutes prises à son insu, alors qu’elle effectue différentes tâches sur le navire. Par la...