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Deuxième décès en 2023 d’un détenu au centre fermé de Merksplas

Deuxième décès en 2023 d’un détenu au centre fermé de Merksplas

Ce lundi 25 décembre, le jour de Noël, un homme détenu au centre fermé de Merksplas (Flandre) est décédé. Si l’Office des étrangers avance la thèse du suicide, les raisons de ce décès restent floues quand l’atrocité des conditions de détention, elle, reste certaine. C’est le deuxième décès qui survient cette année dans ce même centre fermé.

Belgique | sur https://stuut.info | Collectif : Bruxelles Dévie | Collectif : Bruxelles Dévie

Le 15 février 2023, nous alertions sur les conditions de détention et les circonstances troubles de la mort de Tamazi Rasoian, dont l’enquête est toujours en cours.

Selon la direction, l’homme dénommé A. se serait pendu peu de temps avant le dîner de Noël organisé dans la salle commune du centre fermé. Cette tragique nouvelle a pris de court ses codétenus qui dénoncent les traitements inhumains qui leur sont réservés, ce décès comme « le résultat des mauvaises conditions » [1]. Par ailleurs, le directeur du centre fermé de Merksplas déclare « ne pas pouvoir faire de commentaires » et renvoie vers l’Office des étrangers. Une enquête est menée par le parquet afin de déterminer la nature exacte du décès.

Selon les témoignages des détenus récoltés par le collectif Getting the Voice Out, A. était un Algérien d’une quarantaine d’années, détenu depuis environ trois semaines en centre fermé. Il aurait déclaré avoir subi des violences policières lors de son transfert au centre fermé. Un autre détenu témoigne : « quand il est arrivé ici, il boitait, tout son corps lui faisait mal ». L’homme aurait ainsi demandé une aide médicale à son arrivée mais celle-ci lui a été refusée. En contestant ce refus, il aurait donc été transféré au bloc 5 où sont situées les cellules d’isolement médical.

Toutefois, ces cellules médicales semblent tout sauf être des lieux de repos et de soin comme en témoigne un de ses codétenu pour qui les cellules s’apparentent davantage à « un réel cachot » ou « une prison » isolée, sans téléphone. Il y fait froid et elles n’offrent souvent pas d’autre choix que de dormir sur le sol. Par ailleurs, A. devait être expulsé vers l’Allemagne cette semaine ou la suivante selon le règlement Dublin [2]. Une chose semble sûre, les conditions de détention sont inhumaines lorsque la Belgique, elle, accumule plus de 7 000 condamnations pour non-respect des droits d’accueil des demandeur·ses d’asile [3].

Les circonstances de ce décès font écho à celui de Tamazi Rasoian le 15 février 2023, détenu kurde qui avait fuit la Géorgie, et qui avait été retrouvé mort en cellule d’isolement médical dans ce même centre fermé de Merksplas. Lorsque l’Office des étrangers et la direction du centre ne souhaitaient pas communiquer davantage que la thèse d’un suicide, sa famille constatait de nombreuses blessures sur le corps de Tamazi [4]. Après la polémique autour de son décès et dans une tentative « d’humanisation » des centres fermés, la direction a mis en place une cellule d’assistance psychologique avec trois psychologues, alors financée par l’Office des étrangers. Difficile cependant d’avoir confiance en les déclarations de ces autorités que l’on sait structurellement créées pour réprimer les droits des exilés, qui organisent la violence puis s’en étonnent.

Pour rappel, la durée de détention en centre fermé est théoriquement limitée à deux mois mais cette garantie se voit en pratique souvent mise à mal. En effet, le Ciré souligne que lorsqu’une demande d’asile est effectuée ou lorsque le·a détenu·e s’oppose à son expulsion, la durée est réinitialisée et la personne se voit à nouveau être détenue pour au minimum deux mois [5]. Le collectif Getting the Voice Out recensait au moins 9 personnes mortes en centre fermé entre 2007 et 2018 en Belgique. Enfin, seulement pour le centre fermé de Vottem, dans la province de Liège, le CRACPE y recense au moins 44 tentatives de suicide depuis 2008 [6] [7].

Ces collectifs alertent donc sur l’enfer que représentent ces centres fermés, véritables prisons empreintes de racisme, quasiment coupées de toutes communications, et dans lesquels nombre de détenu·es en viennent à s’automutiler. Les tentatives « d’humanisation » des centres fermés entreprisent par les autorités ne feront que, si ce n’est rassurer la conscience de ces dernières, maintenir un système raciste qui perpétue des violences envers les exilé·es. En s’opposant aux politiques migratoires sélectives et meurtrières, aux frontières et aux dispositifs carcéraux qui en découlent, des collectifs tels que GVO et le CRACPE militent pour la libre circulation et l’accueil digne pour tous·tes les exilé·es.

Voir en ligne : BXL Dévie

Notes

[1Communiqué de presse par Getting the Voice Out (GVO) & Collectif de Résistance Aux Centres Pour Etrangers (CRACPE)

[2Le règlement Dublin détermine le pays responsable de la demande d’asile et notamment le premier pays d’entrée de la personne au sein de l’Union européenne, où les empreintes ont été prises. Cela permet à la Belgique de renvoyer les personnes demandeuses d’asile vers le pays dubliné. (GVO)

[6Rapport 2019 du Ciré

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