Droits sociaux / Services publics

Grève de 1960 : il y a 62 ans, la Belgique au bord de l’insurrection
Au milieu de l’année 1960, le gouvernement essaye de reporter les pertes qu’occasionne l’indépendance du Congo sur les travailleur.se.s belges : “un effort spécial doit être engagé” suite aux “dommages économiques importants” de l’indépendance du Congo. C’est dans ce but qu’il propose le projet de la loi unique au parlement en septembre 1960. C’est une loi qui voulait redresser l’économie belge par l’austérité [1], portée sur les travailleur.se.s du public et du privé : l’idée était de s’en prendre aux chômeurs, au secteur de la santé, aux pensions, … tout en mettant en place une politique favorable aux entreprises. Article paru sur Bruxelles Dévie Au départ, cette loi fait réagir les travailleur.se.s. Pourtant, les syndicats nationaux [2] n’ont jamais déclaré la grève générale, ni la CSC (fédération de syndicats chrétiens), ni la FGTB (fédération de syndicats socialistes). M. Cool, président de la CSC refuse de s’opposer à la loi unique dans son ensemble et propose de négocier avec le gouvernement. Le Parti Socialiste Belge, quant-à-lui, s’oppose à la loi unique et demande la démission du gouvernement. Pourtant, à la suite du mouvement de grève, il demande aux grévistes de retourner au travail et de laisser cette affaire entre les mains des parlementaires. Ni les directions syndicales, ni les partis politiques n’ont vraiment soutenu la grève, mis à part le Parti communiste belge. Le 14 décembre, ils sont 100.000 travailleur.se.s à prendre la rue. Dès le 20 décembre, date des débuts des débats parlementaires sur la loi, plusieurs secteurs (“sous-groupes”) de syndicats se lancent dans la grève générale, majoritairement en Wallonie. Le lendemain, le Secrétaire National de la FGTB déclare “Nous avons essayé, M. Le Premire Ministre, par tous les moyens, même avec l’aide des patrons, de limiter la grève à un secteur particulier”. Rien n’y fait : la colère des travailleur.se.s est trop grande ; un immense mouvement de grève générale embrase le pays dès le 21 décembre, après que de nombreux.ses ouvrier.ère.s aient appelé, dans pratiquement toutes les usines, à rejoindre le mouvement. De nombreuses centrales syndicales qui n’avaient pas suivi le mouvement se voient presque forcées de déclarer la grève générale dans les jours qui suivent, comme à Charleroi. Des rassemblements et manifestations se déroulent dans tout le pays. Le 22 décembre, le président de la CSC déclare au Premier Ministre : “je ne tiens plus mes troupes en main, en dépit de nos consignes, les syndicats chrétiens fraternisent de plus en plus avec leurs collègues socialistes”. A la suite de la grève, de nombreuses communes se retrouvent sans aucun employé communal, ni pour l’administration, ni pour le ramassage des déchets, ni même, dans certains cas, pour la police. Pendant toute la période de la grève, donc, ce seront les syndicats, organisés en conseils, qui remplaceront le pouvoir communal dans ces communes, en se divisant les tâches, comme dans la ville de Liège par...

Mémoire des luttes en Belgique - L’insurrection wallonne de 1886
Contenu produit par IRRUPTION, webmédia engagé couvrant la Belgique Francophone, indépendant et apartisan. Contexte En 1886, le suffrage censitaire masculin est d’application en Belgique. Seuls ceux qui payent le plus d’impôts disposent du droit de vote, c’est-à-dire … 2% de la population. Dans le même temps, les conditions de vie du monde ouvrier sont déplorables. Les législations sociales sont alors quasiment inexistantes en Belgique. De plus, en 1886, la Belgique traverse une grave crise économique : forte baisse des salaires, licenciements massifs, chômage généralisé, journée de treize heures …. pour celles et ceux qui ont du travail. Déroulé des évènements Le 18 mars 1886, à Liège, une manifestation est organisée place Saint-Lambert par un comité anarchiste. Celle-ci, visant à commémorer l’anniversaire de la Commune de Paris, tourne à l’émeute généralisée. Affrontements avec les gendarmes et pillages durent toute la nuit. Le lendemain, le bassin liégeois s’embrase. Les charbonnages sont à l’arrêt, la grève est générale, des destructions ont lieu. Dans les jours suivants, les autorités rassemblent une véritable petite armée venue des quatre coins de la Belgique. La région liégeoise est en état de siège, on ne peut circuler sans « laissez-passer », et les arrestations des meneurs se succèdent. Aux alentours du 25 mars, la situation commence à se calmer dans la cité ardente. Néanmoins, à la même date, c’est au tour du Hainaut de s’enflammer. La grève se répand comme une traînée de poudre dans tout le bassin industriel. Le 26, des affrontements et saccages d’usines ont lieu à Gilly et à Jumet, où des milliers d’ouvriers détruisent la verrerie Baudoux et incendient le château du propriétaire. Dans la soirée, les soldats font usage de leurs armes à Roux, faisant 5 tués et 10 blessés graves. Le 27 mars, la région de Charleroi est à son tour placée en état de siège. 22 000 réservistes de l’armée sont rappelés. L’ordre est donné de tirer sur les grévistes sans sommation. Le lendemain, toujours à Roux, les militaires abattent une dizaine d’ouvriers manifestant près des verreries. Le 29 mars 1886, les autorités triomphent sur les ouvriers. On recense une vingtaine de tués dans la population. Au tournant de mars-avril, les ouvriers résignés, reprennent le travail, faute d’argent. Impacts Après la révolte de 1886 et la peur qu’elle a suscitée, la bourgeoisie au pouvoir ne peut plus fermer les yeux sur les conditions de la classe ouvrière. Une commission est chargée d’étudier la « situation du travail industriel dans le royaume ». Plusieurs législations sociales sont votées à partir de 1887 : interdiction du travail des enfants de moins de 12 ans, limitation du travail des jeunes entre 12 et 16 ans, interdiction du travail de nuit pour les hommes de moins de 16 ans et les femmes de moins de 21 ans. La Belgique reste néanmoins fortement à la traîne en termes de droit social, en comparaison à des pays comme l’Allemagne. De plus, le pouvoir...

Témoignage d’une infirmière « Covid » en Suisse romande
Je suis infirmière. Habituellement, je ne travaille pas dans cet hôpital. Mais il y a eu une grande campagne, des appels aux professionnel·le·s de la santé, disant qu’ils cherchaient du monde et que nous pouvions postuler. J’ai passé une espèce d’entretien « éclair » : on m’a demandé mon métier, mon diplôme, mon parcours et une petite question clinique. J’ai bien répondu à celle-ci et j’ai été engagée. J’ai commencé peu de jours après. C’était assez rapide. Ce témoignage à été récolté par Le Silure en avril 2020 et publié en juin 2020 « Là, il n’était pas question de rentabilité. Là, c’était le service public. Et ça s’est ressenti. » J’ai travaillé aux soins intermédiaires Covid ; un service de soins aigus, très hospitalier, juste avant les soins intensifs. Un service pour les gens hospitalisés qui ont besoin d’être soutenus dans leur maladie, qui ont besoin d’une assistance pour passer le cap. Après, il y a ceux dont on parle beaucoup, qui sont aux soins intensifs. Elles et ils sont mis dans le coma et, en gros, les machines prennent le relais pour que leur corps fonctionne, le temps de se remettre du Coronavirus. Et moi, j’étais à la croisée des deux, dans un service qui reçoit des patient·e·s dont l’état stable se détériore. Certaines personnes supportent mieux le Coronavirus, car leur système immunitaire arrive à le combattre. Mais quand une personne souffre d’une forme qui dégénère, ça va super vite, elle est anéantie en quelques heures. Le but du service où j’ai travaillé, c’est de ralentir la péjoration et d’éviter au maximum l’intubation. L’intubation, c’est rude pour le corps. Quand on intube des gens attaqués aussi fortement par une maladie, ce n’est pas évident. C’est un acte invasif, les gens sont dans le coma, sédatés. On essaie d’éviter cela. Parce qu’il y a des complications liées à l’intubation, par exemple, des risques de surinfection hospitalière. Parce que pour les patient·e·s, moins elles et ils subissent d’actes invasifs, mieux c’est. Et aussi parce que la survie est directement liée au nombre de lits. Si on arrive à retenir et empêcher la dégradation chez certain·e·s, il reste plus de lits aux soins intensifs pour d’autres cas graves. « Elle a monté en deux semaines un service de soins intermédiaires. » Le service dans lequel j’ai travaillé n’existait pas avant. Une collègue a été appelée le samedi pour commencer le lundi. Elle m’a raconté que son premier jour a consisté à installer le service. Elles et ils étaient 50, une fourmilière incroyable. Il n’y avait pas de lits, pas de matériel. C’était un étage de bureaux. Cette équipe a transformé ce service en deux semaines alors que, en temps normal, ça aurait pris un an. Elle a monté en deux semaines un service de soins intermédiaires avec un équipement important réquisitionné de partout. Tout l’hôpital a fermé ses services non-indispensables. On héritait d’un appareil pour prendre la tension qui venait de la pédiatrie, une pompe du service de chirurgie...