Histoire / Archives

Neutralité du service public : bas les masques !
La neutralité du service public est une question qui ne cesse d’enflammer le débat public et de donner lieu à des polémiques qui ne manqueront pas d’animer la campagne électorale du méga scrutin du 9 juin prochain. Rétroactes. En mai 2021, le tribunal du travail francophone de Bruxelles avait condamné la STIB pour discrimination en raison de sa politique d’interdiction du port de signes confessionnels pour les membres de son personnel au nom d’une neutralité dite “exclusive”. Cette décision de justice avait provoqué des tensions au sein de la majorité bruxelloise qui ont débouché sur la création d’une commission chargée d’auditionner des experts. Dans le même temps, l’opposition MR avait déposé une proposition d’ordonnance visant à interdire expressément le port de signes convictionnels (aussi bien religieux que politiques) pour les agents publics bruxellois. Le 30 novembre 2023, c’est à la faveur d’une motion déposée par Ecolo visant à lever l’interdiction du port de signes religieux au sein de l’administration de la commune d’Anderlecht qu’une surchauffe politique et médiatique a été observée à nouveau, suscitant des commentaires de toutes parts, engendrant le malaise habituel sur cette question au sein du PS ainsi qu’une virulente opposition du MR et de DéFI. Deux jours plus tôt, le 28 novembre 2023, c’est la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui a alimenté, à son tour, le débat en rendant un arrêt autorisant l’interdiction du port de signes confessionnels au nom d’une neutralité dite ”exclusive”. Dans cet arrêt, la CJUE a précisé qu’une autorisation du port de signes confessionnels, et ce au nom d’une neutralité dite “inclusive”, est un choix tout autant possible et conforme au droit de l’UE en matière de droits fondamentaux. Nous y reviendrons. Dans les lignes qui suivent, nous proposons d’apporter un peu de clarté dans un débat public où la machine à produire de la confusion tourne à plein régime. Nous procéderons en deux temps. D’abord, nous reviendrons sur la notion d’apparence, mobilisée par les partisans d’une neutralité dite “exclusive” pour prôner l’interdiction du port de signes confessionnels pour les prestataires du service public. Ensuite, nous aborderons les implications de la jurisprudence de la CJUE, qui au-delà de la controverse juridique invite le politique à faire un véritable choix de société. I. La notion d’apparence (de neutralité) Fonction publique : pas une chasse gardée Tout d’abord, il convient de rappeler que la fonction publique n’est pas une chasse gardée réservée à l’un ou l’autre groupe de la société. La fonction publique est organisée par et pour la collectivité et, par conséquent, chaque membre de la collectivité qui participe à son financement a en principe égale légitimité pour prendre part à sa mise en œuvre. Ce principe connaît bien sûr des exceptions en cas de violation de la loi. Ensuite, il convient de rappeler la logique qui s’applique en matière de droits...

[Manifestation] Forges de Clabecq : la lutte continue !
Manifestation le dimanche 2 juin à Vilvorde Les Forges de Clabecq étaient une usine sidérurgique, située à Clabecq, dans la commune de Tubize. La lutte des ouvriers des Forges dans les années ’90 a été un concentré d’expériences de travail et mobilisation syndicales. Deux générations de délégations syndicales avaient fait des Forges un bastion du mouvement ouvrier et anticapitaliste. Les années 1996 et 1997 sont marquées par des mouvements contre une faillite accompagnée par la région wallonne. Au-delà des images connues des ouvriers des Forges dégageant au bulldozer des camions pleins de gendarmes et des dizaines de milliers de manifestants solidaires affluant vers Tubize, l’expérience de Clabecq a aussi été une politique systématique de solidarisation des luttes sociales et de connexion avec les forces vives de la région. Cette lutte, sa radicalité et l’immense solidarité qu’elle a recueillie a provoqué une réaction « en bloc » du système qui mérite aussi d’être étudiée, allant du lynchage médiatique aux poursuites judiciaires. 30 ans plus tard, les anciens travailleurs de Clabecq sont toujours confrontés au mépris et à l’hostilité des institutions. Ils attendent encore les 20 millions d’euros auxquels ils ont droit depuis la faillite des Forges. Le terrain de l’ancienne cokerie de Vilvorde, qui appartenait aux Forges, doit être valorisé en collaboration avec la commune de Vilvorde et la région flamande. L’État, qui s’était porté garant des prêts bancaires faits aux Forges, a déjà revendiqué le produit du terrain en se déclarant prioritaire sur les ouvriers. Nous appelons à une large mobilisation autour du terrain de Vilvorde : primo pour que la richesse revienne à ceux qui l’ont créée, et que l’argent récupéré par la curatelle rembourse les travailleurs en priorité ; secundo pour ce que vaste et beau terrain soit consacré à des projets dont la population puisse profiter, et non livré à la spéculation. Manifestation le dimanche 2 juin à 17H, slachthuisstraat, à Vilvorde organisée par "Ceux de Clabecq" avec le soutien de Classe contre classe, du réseau ADES, du comité bruxellois des Soulèvements de la Terre, du Front d’action révolutionnaire, d’Occupons le Terrain et l’IWW Bruxelles. Contact : ceuxdeclabecq@gmail.com

Palestine : un cri étouffé jusque dans le monde associatif et médiatique bruxellois
Est-il acceptable que la tenue d’une conférence portant sur la résistance palestinienne entraîne la descente d’une brigade anti-terroriste dans un lieu culturel et dans la rédaction d’un média ? Analyser les enjeux fondateurs qui sous-tendent la situation actuelle en Palestine est une entreprise d’intérêt général. Il est évident que le débat public est actuellement influencé par certains effets de cadrage et des mécanismes de légitimation/délégitimation qui doivent être mis en perspective. ZIN TV travaille depuis de longues années sur ces mécanismes de propagande. Nous sommes même subsidiés pour accomplir ce travail et pour le promouvoir. La nécessité d’entendre d’autres récits que celui proposé par la diplomatie israélienne est pour le moins légitime. Pourtant, les propositions d’analyses qui s’écartent du récit imposé depuis le 7 octobre 2023, sont silenciées, criminalisées, accusées de faire l’apologie du terrorisme ou de l’antisémitisme. Face à ce manque de pluralité médiatique, il nous semblait important de soutenir l’expression de voix qui ne s’inscrivent pas dans ce « bruit médiatique ». En ce sens, dans le cadre de la Permanence Vidéo des Luttes Sociales, nous avons documenté depuis les premières mobilisations la solidarité populaire exemplaire qui s’exprime en soutien à la Palestine. Afin de rendre compte de la situation avec plus de profondeur et de sensibilité, nous avons également mis en place un cycle de projections de films documentaires autour de cette question. Nous avons aussi réalisé une émission qui permettra de déconstruire les biais majeurs et récurrents du traitement médiatique israélien, en essayant d’assumer au mieux ce rôle délaissé de contre-pouvoir (bientôt en publication sur notre site). Entretemps, le collectif Samidoun, un réseau international de solidarité avec les milliers prisonniers politiques palestiniens détenus dans les geôles israéliennes, nous a demandé d’accueillir un de leurs événements dans nos locaux au CBO à Jette (il s’agit d’une occupation temporaire qui regroupe une dizaine de collectifs et associations). L’événement en question portait sur la criminalisation croissante des organisations (pro-)palestiniennes en Europe. En tant que média d’action collective, cultivant une proximité avec le terrain associatif et militant, nous estimions que cela entrait en adéquation avec nos missions et qu’il s’agissait d’un sujet d’intérêt général. Nous avons donc accepté la demande. A peine Samidoun a‑t-il publié une annonce faisant la promotion de cet évènement, que nous recevions un appel de la commune de Jette disant avoir été informée par l’ambassade israélienne qu’un évènement “problématique” avait été programmé au CBO. Nous apprenions qu’une enquête de police et de l’OCAM avait été diligentée pour déterminer si cette conférence représentait un danger (...)

Journée internationale d’action avec Daniela Klette et les camarades recherchés
L’arrestation de Daniela Klette après une clandestinité de plusieurs décennies (voir notre article), dans un état dont la police, qui a tant de moyens, faisait de ce dossier une priorité, est un exploit. Une telle clandestinité fait, par procuration, la fierté de tout le mouvement révolutionnaire, et lui donne une leçon d’intelligence, de méthode et de détermination. Le nombre de manifestation de sympathie avec Daniela, Ernst-Volker et Burkhard (les deux autres membres de la RAF encore recherchés) montre que ce sentiment est largement partagé, ce qui rend d’autant plus enragé les représentants du régime. Le fait que Daniela ait été placée immédiatement à l’isolement total est une nouvelle marque de cet rage, tout comme de licenciement d’une infirmière qui avait participé à une manifestation solidaire. Au delà des clandestins de la RAF, nombre d’autres camarades ont fait le choix difficile et courageux de la clandestinité, plutôt que de se soumettre à la justice de classe ou de négocier avec elle. C’est le cas de nombreux antifascistes poursuivis pour différentes affaires (Antifa Ost, Budapest). Les structures du régime (politique, policière, judiciaire et médiatique) veulent briser cette dynamique antifasciste comme toute dynamique de résistance, car c’est dans la résistance que se forge la perspective révolutionnaire. Le Secours rouge international appelle à soutenir ce toutes les manière les camarades recherchés, et à donner une démonstration de cet engagement en participant à une journée internationale d’action le 14 avril, jour d’une manifestation de solidarité avec Daniela Klette devant la prison de Vechta. voir le texte complet de l’appel

[brochure] Nolympic City : Contre la candidature d’Amsterdam aux Jeux Olympiques et Paralympiques d’été 92
Ce texte a été publié en 1991 dans le zine NN, soit Nomen Nescio (« nom inconnu ») la locution latine utilisée aux Pays-Bas par les flics pour désigner une personne sous X. Il fait le récit de luttes qui, entre 1984 et 1986 à Amsterdam, ont chahuté la ville dans sa candidature pour accueillir les JOP d’été 1992. En PDF imprimable en fin d’article. Le Comité International Olympique (CIO) désigne une ville hôte plusieurs années avant chaque édition. Les sélections pour 92 s’ouvrent donc au milieu de la décennie 1980, période riche en mouvements de contestation très affirmés en Hollande, notamment autour des squats, milieux autonomes et révolutionnaires, contre par exemple la gentrification, l’apartheid ou encore les politiques d’immigration. La candidature finira par être rejetée, au bout de deux années d’agitations audacieuses. « Nolympics » semble avoir été repris plusieurs fois depuis, pour désigner les antagonismes au CIO dans différentes régions du monde, lorsqu’il compte y mettre les pieds. « Populaire ou pas, l’action directe permet de maintenir des questions importantes dans l’actualité et les conversations privées : saboter un barrage destructeur de l’environnement peut apporter ses effets écologiques, que les gens approuvent ou pas le sabotage lui-même. L’action directe peut donner à un groupe un poids politique et social : dans les années 1980, les squattereuses néerlandais⋅e⋅s faisant face à la menace d’expulsion ont démontré leur force avec une campagne ciblée de harcèlement et de vandalisme qui a fait perdre à Amsterdam sa candidature en tant que ville hôte pour les Jeux Olympiques, et ainsi gagné un avantage dans la négociation avec la ville pour leurs maisons. » Recipes for Disaster : An Anarchist Cookbook (CrimethInc., 2004) « Une des raisons pour lesquelles Amsterdam a perdu sa candidature pour les JO de 1992, ouvrant la voie a une gentrification agressive à Barcelone, est qu’un groupe déterminé d’autonomes, de squattteureuses, et d’anarchistes était stratégiquement attentif aux mouvements de leurs adversaires, a eu vent des projets, et lança une campagne créative, perturbatrice, tenace pour harceler le Comité Olympique et promettre un désastre si les Jeux venaient dans leur ville. » Peter Gelderloos (ROAR Magazine, 2015) « On ne sait pas pour le moment comment procéder. Il n’ya pas encore de projets concrets. On veut examiner comment s’est passée la campagne à Amsterdam et ce qu’on peut en apprendre. Ce qu’on a entendu jusqu’à présent nous semble très bien, en particulier le fait de rendre les choses publiques et de prendre en chasse le CIO pour ouvertement attirer l’attention. De plus on va probablement mener des actions sur les sites en construction et expliquer aux riverain·e·s les conséquences : ainsi on espère que l’opposition s’y développe également. » Une personne de Nolympics Berlin (NN n°94, 3 octobre 1991)